Boccace De mulieribus claris Traduction Laurent de Premierfait Illustrations Robinet Testard Français 599, fol. 47, Fuite de Cloelia BNF
Il s’agit du cinquantième portrait de la galerie des cent-six Cleres et nobles femmes de Boccace, qui aborde ici la preuve extraordinaire de courage d’une jeune romaine, Cloelia.
Juste après la proclamation de la république, en -509, les Tarquin, expulsés de Rome sont venus demander au roi étrusque, Porsenna, de les aider à reconquérir Rome. Mais la guerre s’enlise et Porsenna préfère négocier. Une paix est signée et des otages sont remis. C’est le moment que choisit Cloelia pour s’évader. L’épisode est raconté par Tite-Live, dans l’Histoire romaine[i]:
“(II, 13) Exploit de Clélie
“En renvoyant Mucius, à qui la perte de sa main droite fit donner, dans la suite, le nom de Scaevola, Porsenna ordonne à des ambassadeurs de le suivre à Rome. Le danger qu’il venait de courir, et dont la méprise de son meurtrier l’avait seule préservé, et plus encore ce combat qu’il aurait à soutenir tant qu’il resterait un seul des conjurés, l’avaient tellement ému qu’il fit, de son propre mouvement, des propositions de paix aux Romains.
Il chercha vainement à mettre au nombre des conditions le rétablissement de la famille royale, et, s’il le fit, ce fut plutôt parce qu’il ne pouvait refuser cette démarche aux Tarquins, que dans la conviction qu’il n’éprouverait point un refus. La restitution du territoire de Véies fut consentie, et les Romains se virent obligés de livrer des otages pour obtenir l’évacuation du Janicule. La paix conclue à ces conditions, Porsenna retira ses troupes de ce poste, et sortit du territoire de Rome.
“Le sénat, pour récompenser l’héroïsme de Gaius Mucius, lui donna, au-delà du Tibre, des terres qui, depuis, ont été appelées de son nom, Prés de Mucius. Cet honneur, accordé au courage, excita les femmes à mériter aussi les distinctions publiques. Comme le camp des Étrusques n’était pas très éloigné des bords du Tibre, Clélie, l’une des jeunes Romaines livrées en otage, trompe les sentinelles, et, se mettant à la tête de ses compagnes, traverse le fleuve au milieu des traits ennemis, et, sans qu’aucune d’elles eût été blessée, elle les ramène à Rome, et les rend à leurs familles.
“À la nouvelle de cette évasion, le roi, indigné, envoie à Rome pour réclamer Clélie, sans paraître tenir beaucoup aux autres; mais bientôt, passant de la colère à l’admiration, et mettant ce trait d’audace au-dessus des actions des Coclès et des Mucius, il déclare que si on ne lui rend pas son otage, il regardera le traité comme rompu; mais que si on la remet en son pouvoir, il la renverra à ses concitoyens sans lui faire essuyer aucun mauvais traitement. On tint parole de part et d’autre : les Romains, conformément au traité, rendirent à Porsenna les gages de la paix; et de son côté, le roi des Étrusques voulut que non seulement la vertu fût en sûreté auprès de lui, mais qu’elle y fût même honorée.
“Après avoir donné des éloges à Clélie, il lui fit présent d’une partie des otages, et lui en abandonna le choix. Lorsqu’on les eut tous amenés en sa présence, elle choisit, dit-on, les plus jeunes, croyant, par respect pour la pudeur, (et elle obtint, à cet égard, l’entier consentement des otages eux-mêmes) devoir soustraire avant tout aux ennemis celles que leur âge exposait le plus aux outrages.
“La paix rétablie, les Romains récompensèrent, par un genre d’honneur extraordinaire, un courage aussi extraordinaire dans une femme; on lui décerna une statue équestre; et l’on plaça au haut de la voie sacrée l’image de Clélie à cheval“.
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[i] Tite-Live L’Histoire romaine de Tite Live Livre II : Les événements des années 509 à 468 II-13.
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