
Boccace De mulieribus claris Traduction Laurent de Premierfait Illustrations Robinet Testard Français 599, fol. 72v, Cornificia écrivant BNF
Il s’agit du quatre-vingt-quatrième portrait de la galerie des cent-six Cleres et nobles femmes de Boccace, qui présente la poétesse Cornificia, soeur du poète Cornificius, fille de Quintus Cornificius et épouse de Camerius.
L’inspiration de Boccace, vient sans doute d’une seule phrase de la Chronique de Saint-Jérôme, citée par Jane Stevenson[i], à propos du frère de Cornificia, Cornificius, prêteur et augure, qui mentionne également les épigrammes de Cornificia, en utilisant le mot « insignis » qui signifie, d’après Jane Stevenson, fameux, excellent.
L’histoire romaine [ii] mentionne, après l’assassinat de César, que Lucius Cornificius, se fit l’accusateur de Brutus, avec une note de revoi, selon laquelle :
« La famille Cornificia tenait un rang considérable parmi les maisons plébéiennes de Rome. Dès l’année 690, un Quintus Cornificius, avait été le compétiteur de Ciceron pour la dignité consulaire et devint son collègue dans l’augurat. Macrobe cite les oeuvres d’un Cornificius poète et homme de guerre, du temps d’Auguste. Peut-être est-il le même que le critique de Virgile dont parle Donat, dans la vie de ce prince des poètes latins ? Quoi qu’il en soit, il est certain que le nom de Cornificius est connu par les lettres de Ciceron et par les ouvrages de Catulle. Saint Jerôme, dans la Chronique, fait mention du poète Cornificius, et assure qu’il fut tué par des soldats irrités de ce que, dans ses vers, il les avait accusés de lâcheté, en les comparant à des lapins armés. Cornificia, soeur de ce poète, se rendit célèbre par ses poésies, sous l’empire d’Auguste. S Hieron in Chronic« .
La lettre 603 de Ciceron [iii] à son ami Atticus, mentionne le nom de Cornificia, déjà vieille et mariée à plusieurs reprises:
« A ATTICUS. Tusculum , juin.
A. XIII, 29. Je causais philosophie avec Nicias, et, sans en avoir l’air, je fis tomber la conversation sur Thalna. Nicias n’a pas une très-haute idée de son mérite. Il le regarde comme un jeune homme honnête et rangé. Mais voici ce qui ne me plaît guère. Nicias prétend savoir que Thalna a recherché la main de Cornificia, la fille de Q. Cornificius, laquelle est bien vieille assurément, et a été mariée nombre de fois. Les femmes n’en ont point voulu, parce qu’elles ont découvert que toute la fortune de Thalna consistait en huit cent mille sesterces. Il est bon, je crois, que vous sachiez ce détail« .
Jane Stevenson note par ailleurs, que le mari de Cornificia, Camerius était peut-être ce Camerius auquel Catulle fait référence, dans son poème 55[iv], qui paraît partager le mode de vie licencieux de Catulle et qui est sans doute également poète :
À CAMÉRIUS
De grâce, s’il n’y a pas d’indiscrétion de ma part,
indique-moi ta cachette. Je t’ai cherché au Petit Champ de Mars,
au Cirque, aux étalages de tous les libraires, dans le temple saint de Jupiter souverain,
j’ai arrêté aussi, cher ami, toutes les petites femmes, et aucune cependant n’a changé de visage,
même hélas! quand je lui demandais avec instance de tes nouvelles:
« Friponnes, leur disais-je, qu’avez-vous fait de mon cher Camérius? »
L’une d’elles pourtant m’a dit, découvrant son sein nu:
« Tiens, le voici caché entre ces boutons roses. »
Enfin, de te supporter, c’est un travail d’Hercule.
Quand bien même j’aurais le corps du gardien des Crétois,
le vol rapide de Pégase, quand je serais Ladas,
Persée aux pieds ailés, ou l’un des coursiers de Rhesus blancs comme la neige,
quand tu attellerais à mon char tous les êtres aux pieds emplumés
et qui volent, fussé-je emporté sur l’aile des vents,
quand tu me les offrirais, Camérius, tout d’un coup;
néanmoins, je tomberais épuisé de toutes mes moelles
et accablé de langueur à force de te chercher.
D’où vient que tu te dérobes avec tant d’orgueil, ami?
Dis-nous où tu seras. Allons, courage, confie-toi à moi,
montre-toi au grand jour. Est-il vrai que tu es le captif d’un sein couleur de lait?
Si ta langue reste ainsi clouée à ton palais, tu perdras tous les fruits de ton amour,
car Vénus aime les bavardages. Ou bien encore, si tu veux,
verrouille-toi le palais, mais du moins sois le confident de mes amours
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[i] Women Latin Poets: Language, Gender, and Authority, from Antiquity to the eigteen century par Jane Stevenson. Oxford University Press 2005. p 34.
[ii] Histoire romaine depuis la fondation de Rome François Catrou et Pierre-Julien Rouille, Tome 18, depuis l’an de Rome 710 jusqu’à 712. Paris 1734.
[iii] Ciceron Correspondances Lettres 600 à 649.
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