Marco Fabio Calvo est célèbre pour avoir été le premier à traduire Hippocrate du grec au latin, pour avoir traduit Vitruve du latin en italien pour Raphael qu’il a accompagné dans ses investigations sur la Rome antique. Il a publié en 1527, l’année de sa mort, le Simulacrum, la première compilation de l’histoire, sur les monuments de la Rome antique.
Le personnage de Fabio Calvo apparaît dans mon roman, « Les Roses de Camerino« , il peut être utile au lecteur d’en connaître davantage.
Marco Fabio Calvo de Ravenne est né vers 1440 à Ravenne. Les trois quarts de sa vie sont restés dans l’obscurité[i]. Son nom apparaît pour la première fois dans l’histoire, le 3 avril 1510, alors qu’il est déjà âgé de soixante ans, lorsqu’il entreprend la traduction du Corpus Hippocratique.
On l’a prétendu médecin à cause de sa traduction d’Hippocrate, mais les critiques littéraires ont jugé qu’il ne comprenait pas toujours ce qu’il avait traduit. Il a probablement bénéficié d’une solide instruction aux lettres classiques pour être à Rome, au moment du pontificat de Jules II, un connaisseur, chargé, sans doute à la demande du pape, de la traduction de cette œuvre majeure de l’antiquité, qui va faire souffler un vent nouveau sur la médecine, jusqu’alors inspirée essentiellement par Galien.
La traduction du Corpus Hippocratique
Un an avant l’édition Aldine (Aldo Manuzio à Venise) du corpus hippocratique en grec, Fabio Calvo publie, en 1525, chez Francesco Giulio Calvo à Rome, sa traduction en latin, un langage accessible à tous les lettrés, de manuscrits grecs d’Hippocrate. Cet ouvrage, intitulé « Hippocratis Coi medicorum omnium principis longe, octoginta Volumnia quibus maxima ex parte, annorum circiter duo millia Latina caruit lingua » se trouve actuellement répertorié sous la cote MS Graecum 278 de la bibliothèque vaticane.

Manuscrit du XIVème siècle sur les travaux d’Hippocrate utilisé par Fabio Calvo Bibliothèque Vaticane
Il s’agit, d’après l’article en anglais figurant en note de bas de page, d’une traduction à partir d’un manuscrit en sa possession, datant du XIVème siècle. Mais il a également consulté un manuscrit beaucoup plus ancien, du XIIème siècle, qui a figuré parmi les manuscrits en possession des papes, depuis Clément IV, qui l’a reçu de Charles d’Anjou, en 1266. Mais Fabio Calvo aurait également utilisé plusieurs autres codex de la bibliothèque Sixtine : sept comme il le dit lui-même à la fin du « De mente sive sensu », cité par l’encyclopédie Treccani. Le manuscrit de traduction aurait été terminé le 24 juillet 1512.
C’est ce qui laisse penser que le travail de Fabio Calvo a dû être initié sur demande du pape Jules II (della Rovere). Les deux manuscrits principaux sont aujourd’hui à la bibliothèque vaticane.
Le propos initial de Fabio Calvo était de publier la traduction latine au regard du texte grec, une intention qui n’a pas été menée à bien, peut-être pour des contraintes de son imprimeur, car le texte ne comprend que la version en latin.
Ce que l’on appelle le Corpus Hippocratique est le recueil d’un ensemble de textes attribués à l’école de médecine grecque de l’île de Cos. La majorité de ces œuvres datent des dernières décennies du cinquième siècle et de la première moitié du IVe siècle avant notre ère.
La traduction d’Hippocrate de Fabio Calvo aura un retentissement extraordinaire en Europe.
Portrait de Fabio Calvo
Voici ce que dit le premier secrétaire de Léon X, Cœlio Calcagnini, protonotaire apostolique de Ferrare, dans une lettre adressée au mathématicien Jacob Ziegler (1470-1549) : « Fabius de Ravenne est un vieillard d’une droiture stoïque, et dont on ne saurait dire en vérité si son savoir l’emporte sur son affabilité… Cet homme très-saint a cette qualité particulière et bien rare, de tellement dédaigner l’argent, qu’il le refuse lorsqu’on le lui offre, à moins qu’il n’y soit forcé par le plus extrême besoin. Du reste, il a du pape un traitement mensuel qu’il partage entre ses amis et ses parents. Lui-même se nourrit d’herbes et de laitues, comme les pythagoriciens, et loge dans un trou qu’on pourrait justement nommer le tonneau de Diogène. A ses études il meurt bien plus qu’il ne s’y adonne; mourir est le mot, puisque ce vieillard de quatre-vingts ans a gagné une grave et dangereuse maladie. Il est soigné comme un enfant par le très-riche et du pape très-estimé, Raphaël d’Urbin, jeune homme de la plus grande bonté, d’un esprit admirable, et qui se distingue par les plus hautes vertus… ».
Comme le souligne Eugène Müntz[ii] Fabio Calvo de Ravenne, hébergé par Raphael qui le considère comme un père, va entreprendre la traduction en italien, de l’ouvrage principal de Vitruve, le De architectura, ce qui démontre que Raphael ne maîtrisait pas le latin. D’après l’auteur de l’article sur Jstor rapporté en note ci-dessous, il devrait avoir achevé sa traduction avant novembre 1516 car Fabio Calvo se tourne alors vers la traduction des commentaires de Gallien sur les Epidémies.
Le Simulacrum de Fabio Calvo
Là encore, laissons provisoirement, la parole à Eugène Müntz : « Calvo fut certainement associé aux recherches sur la topographie de l’ancienne Rome. Ce qui le prouve, c’est que, quelques années après la mort de Raphaël, en 1532, il a publié une sorte de carte des régions de Rome. En retrouvant, à la Bibliothèque de l’École des Beaux-Arts, la première édition de cet ouvrage, édition inconnue à Passavant et aux autres biographes de Raphaël, nous avions d’abord espéré y rencontrer la gravure de quelques-uns des dessins exécutés sous la direction du maître. Mais notre espoir n’a pas été de longue durée. Les planches du Simulacrum, qui pourrait bien avoir paru après la mort de Calvo, sont d’une barbarie incroyable et ne procèdent en aucune manière de dessins tracés par un artiste familiarisé avec l’architecture. La concision du texte correspond à l’insuffisance des gravures. Comme il est cependant certain que la publication se rattache au projet de Raphaël, il importe de le mentionner, ne fût-ce qu’en deux mots.
Le contenu ? Les premières planches représentent les différents aspects de Rome sous Romulus, Servius Tullius, Auguste, etc.; puis vient le plan (si l’on peut donner ce nom à des gravures d’un caractère vraiment enfantin) de chacune des quatorze régions, avec l’indication de ses principaux monuments » (Eugène Müntz Raphael Archéologue et historien d’art).
La publication du « Urbis Romae cum regionibus simulacrum »[iii] résulte d’un travail accompli dix ans plus tôt entre Raphael et Fabio Calvo, dans lequel on ne retrouve, malheureusement, que la patte de Fabio Calvo et non celle du génial Raphael. La publication des travaux de Raphael ne put aboutir compte tenu de sa mort précoce.
Le Simulacrum se présente sous la forme d’un opuscule de cinquante-neuf pages comportant très peu de textes et vingt-quatre illustrations. On peut le télécharger sous le lien figurant dans les notes de bas de page. Le traité a été placé sous le parrainage du cardinal Francesco Armellino, le trésorier du pape et l’un des plus grands collectionneurs privés de statues antiques, de son époque, avec le cardinal Grimani.
Le Simulacrum se présente sous la forme d’une chronologie historique présentant quatre époques différentes de Rome, depuis Romulus, la république de Servius Tullius, la Rome de l’empereur Auguste, puis celle des empereurs de Pline l’Ancien.
Les plans représentent une Rome fictive et idéalisée, d’où paraît absente toute préoccupation archéologique. On a du mal à comprendre le lien entre ces représentations simplifiées à l’extrême des monuments romains et le travail du génial Raphael. On comprend la désillusion d’Eugène Müntz et son jugement acrimonieux sur la publication de Fabio Calvo.
En tant que tel, cependant, il s’agit du premier essai, dans l’histoire, de présentation des monuments de Rome à l’époque de la Renaissance. Il sera suivi de nombreux autres, plus professionnels.
Fabio Calvo va être torturé par les reitres, au moment du sac de Rome, le 6 mai 1527 et il va mourir des conséquences de ses blessures, quelques semaines plus tard, dans un couvent hôpital.
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[i] La matière de cet article est issue de plusieurs sources : article Fabio Calvo de l’encyclopédie Treccani en italien, l’article en anglais Marco Fabio Calvo Revives Hippocrates as the Precursor of Galen, l’article de 1990, de Philip J Jacks The Simulacrum of Fabio Calvo: A View of Roman Architecture all’antica in 1527, chez Jstor, Philip J. Jacks The Art Bulletin Vol. 72, No. 3 (Sep., 1990), pp. 453-481, Raphaël et l’antiquité. Tome 1 / par F.-A. Gruyer, livre Gallica-BNF .
[ii] Eugène Müntz Raphael Archéologue et historien d’art A Quantin Paris 1880 Source Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 4-Z-2001 (2) Livre Gallica BNF,
[iii] Urbis Romae cum regionibus simulacrum de Fabio Calvo Livre Google Book.
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