Le prodigieux élève de Raphael va exercer à Mantoue un leadership artistique et technique sur toute l’activité de la principauté pendant plus de vingt ans. Jouissant de la confiance absolue de son maître, le duc Frédéric de Gonzague, il va transformer la ville de Mantoue en profondeur à un tel point que l’on pourra parler du siècle de Giulio Romano. Aussi habile dans la décoration, la peinture que l’architecture, comme dans la conduite de projet, un art qu’il a appris auprès de Raphael, il laissera au monde étonné les fresques prodigieuses de la salle des géants au palais du Té. Si la manière de Giulio a influencé Titien, sa leçon en architecture même si elle n’est pas toujours pleinement comprise s’étendra en Europe: le Palais de Charles Quint à Grenade, la Résidence du duc de Bavière de Landshut, Fontainebleau, où d’ailleurs Primaticcio est à l’oeuvre après avoir quitté le chantier du Te.
La vie de Giulio Romano, à la différence de peintres moins célèbres, n’a donné lieu à aucun grand travail biographique ni de traduction, en français ou en anglais, des biographies en italien. L’article qui suit a été réalisé sur la base de trois courtes monographies : l’une de Charles Blanc, l’autre de Quatremère de Quincy et la dernière de Vasari. Plusieurs articles publiés par les sites Academia.edu et Persée, sont venus compléter l’assise documentaire[i].
Giulio Romano est mort à Mantoue à l’âge de cinquante-quatre ans, en 1546, d’après Vasari. Il serait donc né à Rome en 1492. De son père, Pietro di Philippo di Gianuzzi, il va conserver le sobriquet de Pippi, une abréviation de Di Philippo, qui ne le quittera plus de toute sa vie. Il semble que son père l’ait placé à l’âge de dix ou onze ans auprès de Raphael.
D’abord serviteur et garçon à tout faire, Pippi ne tarde pas à devenir l’apprenti du maître et même l’un de ses élèves les plus talentueux.
La première fois que le jeune Giulio Pippi entre dans l’histoire, c’est à l’occasion de la mort de Bramante, le 11 mars 1514. Giulio a vingt-deux ans et il est déjà devenu le meilleur élève et plus proche disciple de Raphael dans tous les domaines artistiques, de la peinture à l’architecture.
D’après Vasari, le jeune Giulio était d’un caractère si affable, d’une humeur si gaie et enjouée, que Raphael lui porta une affectation toute paternelle.
Raphael est appelé par le pape Médicis, Léon X, pour édifier le portique de la cour de Saint-Damase au Vatican et à décorer ces galeries ouvertes que l’on appelle les Loges du Vatican.
Les Loges du Vatican : Giulio Romano et Raphael
La galerie, longue de soixante-cinq mètres sur quatre de large, est divisée en treize travées, dont les voûtes sont ornées, chacune, de quatre compositions à fresque.
La première des treize arcades illustre en quatre scènes la création du monde, la seconde représente Adam et Eve, la troisième Noé et le déluge, la quatrième Abraham, la cinquième Isaac, la sixième Jacob, la septième Joseph, les huitième et neuvième Moïse, la dixième Josué, la onzième David, la douzième Salomon, la treizième Jésus dans quatre scènes : l’adoration des bergers, l’adoration des mages, le baptême dans le Jourdain et la Cène.
Les peintures des douze premières voûtes représentent des épisodes de l’Ancien Testament, celles de la treizième, des épisodes tirés du Nouveau Testament, d’où le nom de l’ensemble, la “Bible de Raphaël ». La décoration a commencé en fin d’année 1517 et s’est achevée en juin 1519.
D’après Vasari, Giulio Romano est l’auteur, aux Loges, de la Création d’Adam et Eve, la construction de l’arche de Noé, le Sacrifice et Moïse sauvé des eaux. Cependant, François Anatole Gruyer dans son livre Essai sur les fresques de Raphael aux Loges[ii], estime que dans toutes les peintures des Loges, on retrouve le génie de Raphael, reprenant un détail ici, modifiant là le dessin et les couleurs, à côté de scènes entièrement composées par lui. Les disciples n’interviennent que là où le maître pense qu’ils sont les plus adaptés. Et ils vont intervenir, seuls ou associés à d’autres élèves, dans la plupart des fresques des treize voûtes du plafond.
Les nombreux auteurs qui se sont exprimés pour juger des artistes ayant contribué aux diverses fresques, ont, en général, une opinion abrupte et peu éclairée par des justifications stylistiques. Le caractère très technique de l’appréciation, fondé sur le style de chaque peintre, la finesse et le choix des arguments, m’amènent à donner la préférence aux choix d’attribution de Gruyer.
Ce dernier estime que le pinceau de Giulio Romano, se fait plutôt observer dans les voûtes un (la Genèse), deux (Adam et Eve), trois (Noé), sept (Joseph) et douze (Salomon). Il observe le travail de Francesco Penni dans les voûtes cinq et six, Penni étant assisté dans cette dernière par Pellegrino da Modène, celui de Perino del Vaga dans les voûtes huit et neuf, consacrées à Moïse, celui de Perino Buonacorsi dans la voûte onze et l’association Giulio Romano et Pellegrino de Modène dans la voûte douze.
Raphael s’occupe lui-même de peindre le premier plafond de la création du monde, et le dernier plafond, de la Cène, puis il confie à ses élèves, dont Giulio Romano, Francesco Penni, Pellegrino da Modena, Perino del Vaga, Jean d’Udine, Rafael delle Colle et Polydore de Caravage, l’exécution des autres peintures de la galerie et des décorations de « grotesques ». Cependant, il est notable que seul l’élève préféré de Raphael va être associé au maître, dans la décoration des deux plafonds un et treize, principalement réalisés par Raphael.
D’après Charles Blanc, « ce rôle n’était pas celui où le chef des disciples devait briller le plus : son pinceau timide, son faire lisse, propre et léché, ne pouvait qu’affaiblir les belles inventions de Raphael et l’on peut dire que ses carnations d’un rouge de brique, ses demies teintes noires, son coloris dur et sauvage, ont beaucoup contribué à faire croire que Raphael dans ces peintures, avait été totalement dépourvu du sentiment de la couleur ».
La peinture de Dieu créant les animaux dans la première coupole, est de la main de Giulio Romano, ce dernier pouvant avoir été aidé de Jean d’Udine, qui excellait à reproduire les animaux. Toujours d’après Gruyer, « cette peinture est d’ailleurs, dans la première voûte, celle dont l’exécution témoigne le moins de la participation directe de Raphaël. On n’y voit plus cette souplesse de pinceau, cette variété, cet éclat d’ombres et de lumières, qu’on remarquait dans la fresque précédente. A la place de la manière grasse et douce, spéciale au maître, on trouve la trace d’un pinceau dur et d’un âpre talent… ».
Ce qui est certain, c’est que Giulio Pippi, le jeune peintre, encore aux balbutiements de son art est, dès l’époque, le plus proche collaborateur et le plus employé par Raphael. Il met la main non seulement aux fresques, mais encore à la première ébauche des peintures à l’huile du maître. Charles Blanc en tire pour preuve, le tableau de la Sainte Famille, offert à François 1er par le pape Léon X, en 1519, où « le ton brun des chairs, les demi-teintes sombres, la sévérité générale de l’aspect, tiennent, sans nul doute, à l’ébauche de Jules Romain ».
Il n’y a pas de doute que, si proche du maître pour les travaux de peinture, Raphael n’ait associé son élève le plus prometteur, aux travaux d’architecture. C’est ce que pense Vasari, qui, dans sa Vie des plus illustres peintres, juge que la polyvalence de Giulio Romano, se faisait également observer dans l’architecture : « Après avoir appris les choses les plus difficiles dans l’art de peindre, que Raphaël lui enseignait avec amour, Jules parvint bientôt à savoir mettre en perspective les édifices, à les mesurer et à en faire les plans. Parfois aussi, Raphaël, après lui avoir simplement donné l’esquisse de ses inventions, les lui faisait rédiger en grand pour s’en servir dans ses compositions d’architecture ».
C’est ce qui va générer la participation de Giulio Romano, à deux importants chantiers de Raphael : la Villa Madama et la villa du banquier Chigi, la Farnesina.
La villa Farnesina
La villa Farnesina[iii] a été acquise par le cardinal Alexandre Farnese en 1580, et, depuis lors, elle porte son nom. Elle a été cependant construite pour le banquier siennois, Agostino Chigi, à partir de 1508. Ce dernier est l’homme le plus riche de son époque : il a constitué sa fortune comme banquier du pape Jules II et en se faisant affermer les salines pontificales.
Le banquier Chigi confie l’édification de la villa au plus renommé des architectes d’alors, Baldassare Peruzzi et il s’adresse à Raphael et au Sodoma, de son vrai nom Giovanni Antonio Bazzi, pour en décorer, l’un le rez-de-chaussée et l’autre le premier étage. La villa est achevée entre fin 1511 et début 1512.
Ce qui va rendre la villa Farnesina immortelle, ce sont les peintures par Raphael et ses assistants de l’histoire de Psyché et de la Galatée.
La Galatée est, historiquement, la première des œuvres de Raphael à la Farnesina. On connaît la date de sa réalisation par une lettre de Raphael à son ami Baldassare Castiglione, à qui il a adressé, quelques mois plus tôt un projet pour avis. La fresque est réalisée en fin d’année 1514, en dix-sept jours seulement, d’après les calculs d’Eugène Müntz, le spécialiste et biographe de Raphael : ce dernier s’est donc fait aider par tous ses disciples.
Le mythe de Galatée, la belle Néréide, est une légende particulièrement fréquente dans l’art de la Campanie Romaine des premiers siècles de l’ère chrétienne. Il a été décrit par Philostrate l’ancien, un grec de Lemnos, né vers 182, sous le règne de l’empereur Marc-Aurèle. C’est un sophiste qui connaît son heure de gloire sous les règnes des empereurs Septime-Sévère et Caracalla (voir à ce sujet la vie et l’œuvre de Philostrate[iv] sur le site Remacle). Dans son livre II des Tableaux, Philostrate évoque Polyphème, le cyclope, fils de Poséidon, qui essaye d’attirer la belle néréide sur le rivage : ce mythe évoque le thème de l’amour non partagé entre la belle et la bête.
«Ses mâchoires voraces (de Polyphème) découvrent des dents aiguës; sa poitrine, son ventre, ses bras jusqu’aux ongles, tout est velu. Il veut prendre une tendre expression, conforme à son amour ; mais son regard a quelque chose de sauvage et de sournois, comme celui des bêtes féroces, quand elles cèdent à la nécessité. Galatée, de son côté, se joue noblement sur les flots, menant un attelage de quatre dauphins unis par les mêmes sentiments comme par le même joug, et que dirigent, à l’aide du frein, les filles de Triton, servantes de Galatée, pour prévenir toute incartade de leur part, toute rébellion contre les rênes. Au-dessus de sa tête, elle déploie au souffle du zéphyr une étoffe légère couleur de pourpre qui lui donne de l’ombre, sert de voile au char, éclaire son front et sa tête d’un reflet charmant, moins charmant cependant que l’incarnat de ses joues. Ses cheveux ne flottent point au gré du vent ; chargés d’eau, ils défient les efforts du zéphyr. Le coude droit est en saillie, et l’avant-bras, d’une éclatante blancheur, s’incline au point que les doigts reposent sur l’épaule délicate de Galatée. Ses bras ont de molles rondeurs, les seins ont de la fermeté ; le genou même a sa grâce. Le pied, d’une délicatesse conforme à la beauté de l’ensemble, pose sur la mer et l’effleure comme pour servir de gouvernail au char. Les yeux sont une merveille ; leurs regards, comme perdus dans l’espace, semblent atteindre les dernières limites de la mer ».
Le thème de la belle Néréide, poursuivie par le cyclope monstrueux, est repris dans le long poème des Stanze, composé par Politien (voir sur ce Blog, l’article sur La naissance de Vénus et le printemps de Botticelli, entre épicurisme et néoplatonisme) qui évoque également ce poème de Politien. Un poème que Raphael a pu connaître lors de son séjour à Florence mais qui est connu, assurément de toute l’intelligentsia, et notamment de Baldassare Castiglione (voir sur ce Blog l’article sur Baldassare Castiglione, le parfait courtisan au service de la cour d’Urbin), avec lequel Raphael évoque la façon de peindre Galatée. L’idée de Galatée aurait-elle été soufflée à Raphael par le parfait courtisan ? Ou bien Raphael, frappé d’admiration par le tableau de Botticelli, qu’il a regardé à Florence, aurait-il souhaité réutiliser les Stanze du Politien qui comportent de très nombreux tableaux mythologiques ?
Quant au thème de Psyché, il a été notamment décrit dans la fable de l’âne d’or, d’Apulée. Or, Philippe Beroalde le jeune (voir sur ce Blog l’article sur la Bibliothèque Sixtine et ses préfets à la Renaissance), vient tout juste de publier, quelques années plus tôt, en 1500, une traduction des Métamorphoses d’Apulée. Philippe Beroalde se trouve alors à Rome, où il est secrétaire du cardinal Jules de Médicis, le futur pape, Clément VII. Philippe Beroalde est un ami très proche du banquier Chigi. Suivons en cela l’opinion défendue par Eugène Müntz, qui attribue à Philippe Beroalde l’origine de l’idée, qui aurait été suggérée au banquier Chigi.
Le mythe de Psyché est relativement complexe. J’ai recherché pour le lecteur une traduction complète que l’on pourra trouver sur le site Mediterranees.net[v]. Mais ce n’est sans doute pas l’histoire de Psyché qui intéresse Raphael car dans la succession des tableaux peints, on aurait du mal à retrouver le sens du conte. D’après Charles Bigot, l’intention véritable de Raphael est, à partir du thème de Psyché, de décrire les Dieux de l’Olympe. « Il le revoit en sa noblesse et sa magnificence, véritable séjour de la force et de la beauté, demeure de l’idéal, habité par des êtres supérieurs et dignes de dominer le monde » (Charles Bigot).
Du reste, Eugène Müntz n’est pas loin de partager le même avis car les provocations d’Apulée, qui décrit Vénus comme une mégère et qui livre Jupiter à la risée du public, froissent Raphael, qui prend dès lors, de nombreuses libertés avec le mythe. « Froissé dans ses convictions les plus respectables, désespérant de tirer de ce récit diffus et contradictoire la matière d’une suite de peintures vraiment intéressante, le peintre ne songe plus qu’à créer les figures les plus belles possibles, sans se demander si ces créations sont conformes avec le texte des Métamorphoses, si son récit est clair et complet. Il lui arrive ainsi de s’écarte sciemment des données fournies par le romancier antique, voire d’inventer des scènes… » (Eugène Müntz), perdant ainsi totalement le fil conducteur du poème.
Mais le sacrifice de la légende a permis à Raphael de créer une de ses œuvres les plus immortelles. Eugène Müntz note cependant qu’une seule des fresques, celle de l’histoire de Psyché est de la main de Raphael. Les autres sont réalisées par ses élèves, Giulio Romano, Francesco Penni et Giovanni da Udine.
La villa Madama
Le cardinal Jules de Médicis, futur pape Clément VII, neveu de Laurent le Magnifique et cousin du pape Léon X, commande à Raphael, à la fin de 1518, la réalisation d’un palais hors les murs, sur le Monte Mario. Ce dernier dessine les plans d’une villa médicéenne qui sera achevée par Antonio da Sangallo le jeune. La villa sera décorée après sa mort, survenue le 6 avril 1520, par l’équipe de la Farnesina, ses principaux disciples, Giulio Romano, Francesco Penni, pour les peintures et la décoration, Giovanni da Udine pour les stucs et Baccio Bandinelli pour les sculptures, auxquels s’ajoutent le peintre architecte Baldassare Peruzzi, concurrent de Raphael qui a travaillé à de nombreuses reprises avec lui.
Voici la description qu’en fait au XIXème siècle, Quatremère de Quincy [vi]:« Le cardinal Jules de Médicis avait choisi un magnifique terrain sur la pente du Monte Mario, qui s’étendait le long du Tibre, du Ponte Mole jusqu’à la Porta Angelica. C’est là que Raphael établit ce charmant casino dont on admire et l’aspect et la composition pittoresque. La façade se présente par une grande partie demie circulaire, en forme de théâtre, divisée par des niches et des fenêtres, avec une ordonnance ionique. De là on passe dans un vestibule qui conduit à une magnifique galerie ouverte sur le jardin, que Vasari appelle une « loggia bellissima », ornées de niches, qui, toutes, depuis l’origine, étaient occupées par des statues antiques. C’est dans les voûtes de ce local que Giulio Romano a peint cette suite charmante de compositions, représentant les divinités de la Fable, et qui, fort heureusement, ont été gravées, avant leur disparition ».
Il est peu probable que, malgré ses incontestables talents d’architecte, Giulio Romano ait lui-même supervisé l’achèvement de la villa après la mort de son maître. Prendre la suite du maître n’est pas une mince affaire car l’atelier de Raphael grouille d’assistants divers : plus d’une cinquantaine. Les chantiers de peinture étaient suffisamment prenants et urgents pour que Romano ne se crée pas une responsabilité supplémentaire avec le suivi de la construction de la villa qui sera poursuivie jusqu’en 1525.
Etant chargé par Léon X de l’achèvement des fresques de Raphael, notamment dans la Chambre de Constantin, il était normal que le cousin du pape, lui confie également, la responsabilité de la décoration de la villa du cardinal Jules de Médicis.
La villa Madama tient son nom actuel de la duchesse de Parme, la fille adultérine de Charles Quint : cette dernière avait épousé en 1537, Alexandre de Médicis, le premier duc de Florence, propriétaire de la villa, après la mort du pape Clément VII. La villa Madama ne sera jamais achevée complètement. Lors du sac de Rome, survenu le 6 mai 1527 (voir l’article de ce Blog sur le Sac de Rome), la villa tout entière est ravagée par un incendie et totalement détruite.
Il ne reste plus rien des remarquables fresques de Peruzzi et de Romano, sinon des gravures. Seuls les plafonds de la loggia, réalisés par Giovanni da Udine, ont été partiellement épargnés.
La mort de Raphael
La mort de Raphael dans la vie de Giulio Romano est un épisode très important. Tant qu’il vit sous le regard du Maître, Giulio n’est qu’un exécutant, qui essaye de traduire la volonté de son mentor. A partir de la mort de Raphael, sa personnalité va s’émanciper, dans le souvenir quasi-religieux de Raphael.
Il en est de même pour tous les artistes de l’école de Raphael. « Le cœur tenait autant de place que l’esprit dans l’empire que Raphael exerçait sur son école. Il était un véritable père pour ses élèves et cette cordialité qu’il leur témoignait, il réussit aussi à la faire dominer dans les rapports des élèves entre eux. (…) Le souvenir du maître fut assez puissant pour maintenir cette unité longtemps après sa mort. Lorenzetto épousa, d’après le désir de Raphael, la sœur de Giulio Romano, Perino del Vaga, la sœur du Fattore (Francesco Penni). Ce dernier et Giulio Romano s’associèrent à leur tour pour terminer les ouvrages restés inachevés par leur maître. Même association entre Polydore de Caravage et Maturino de Florence, qui résolurent de vivre et de mourir ensemble, en vrais frères » nous dit Eugène Müntz[vii].
Depuis l’avènement de Léon X, Raphael est surchargé de commandes. Ces charges très lourdes, lui imposent de recourir à de nombreux collaborateurs, dont certains comme Francesco Penni et Giulio Romano ou encore le latiniste Fabio Calvo, vivent à demeure chez lui, entretenus par le maître. Depuis 1517, Raphael s’est installé avec tout son monde, dans le palais construit par Bramante à l’angle de la place San Giacomo, qu’il a acheté pour la somme énorme de trois mille six-cents florins.
La maladie qui l’emporte est extrêmement courte. Elle est sans doute liée à un excès de travail qui l’a affaibli au point de succomber à l’une des fièvres endémiques à Rome. Les progrès de la maladie ne l’empêchent pas de mettre en ordre ses affaires et son testament, avant de mourir. Sa fortune se monte à seize mille ducats. Il lègue tout son patrimoine artistique à ses élèves Francesco Penni et Giulio Romano, ce dernier devenant son exécuteur testamentaire artistique, à charge pour eux de terminer les travaux en cours d’exécution.
Il s’agit principalement de la Chambre de Constantin, dont les fresques ne sont encore que des dessins dans des cartons.
Le poids des responsabilités qui pèse sur l’élève du maître disparu est surhumain et il ne peut pas tout faire.
« Accablé de travaux, Raphael a dû se borner le plus souvent à composer les cartons, en s’en remettant à ses disciples, du soin de les traduire en peinture. De là, l’absence de vie dans les têtes, la froideur du coloris, la lourdeur des détails. Quelquefois, il se voyait même contraint de confier à d’autres, l’exécution d’une partie des cartons » résume Eugène Müntz.
Pour terminer la décoration de l’appartement papal, il restait donc à peindre une quatrième « stanze », l’immense salle qui est située du côté de la cour de Saint-Damase et qui est connue sous le nom de salle de Constantin. A la mort du maître, les travaux n’étaient pas encore commencés dans cette salle.
Comment Raphael répartissait-il le travail au sein de sa petite armée de collaborateurs ? Eugène Müntz précise que « selon le témoignage de Vasari, le maître discernait avec sa clairvoyance habituelle les aptitudes de chacun et distribuait le travail en conséquence. Dans les Loges, on l’a vu, il préposa Giulio Romano aux grands travaux et Giovanni da Udine aux stucs et aux grotesques. Francesco Penni débuta également dans les Loges ».
Il est très probable que Giulio Romano soit le principal artiste de la Chambre de Constantin, sans doute aidé, principalement, de Francesco Penni. En effet, en tant qu’exécuteurs testamentaires de la partie artistique du maître, ils avaient la responsabilité d’honorer les commandes du maître. Ils n’ont dû laisser à personne d’autre, la responsabilité de travailler pour le compte du pape Léon X, pour cette tâche éminemment prestigieuse.
Mais le génie des couleurs et des formes n’est pas au rendez-vous des élèves qui vivent encore dans l’ombre de leur maître tout en marquant leur personnalité par des additions au projet de Raphael, qui ne sont pas toujours très heureuses, s’éloignant ainsi du projet initial du maître.
Eugène Müntz estime pour conclure : « La bataille de Constantin n’est qu’un pâle reflet de la fresque rêvée par Raphael. Quelle n’aurait pas été la beauté de la composition s’il avait été donné au maître de la peindre de sa main ».
Comparées aux réalisations de Raphael, celles des élèves paraissent bien fades aux critiques d’art. Ces appréciations qui sonnent comme des coups de fouet, sont sans doute un peu excessives, par rapport au futur génie du palais du Té. Car il est difficile pour les élèves de concilier l’immense respect qu’ils ont pour leur maître et la nécessaire adaptation des croquis du grand Raphael qu’ils se trouvent dans l’obligation d’interpréter en fonction de leur propre caractère.
Le départ de Giulio Romano pour Mantoue
Depuis des années, la marquise de Mantoue, Isabelle d’Este (voir sur ce Blog l’article sur Isabelle d’Este, marquise de Mantoue ou l’art d’être femme à la Renaissance) cherchait à faire travailler Raphael. Mais ce dernier, surchargé de commandes, avait éludé systématiquement les appels du pied répétés de la marquise.
Ces invitations étaient faites pourtant, par l’un des meilleurs et des plus proches amis de Raphael, Baldassare Castiglione (voir l’article sur ce Blog sur Baldassare Castiglione, le parfait courtisan au service de la cour d’Urbin), qui avait fait sa paix avec Francesco II, l’époux d’Isabelle et qui était revenu s’installer à Mantoue en 1516. Baldassare avait été rapidement nommé par le marquis, ambassadeur de Mantoue à Rome et il avait rendu de fiers services à sa patrie d’adoption. Mais il n’était jamais parvenu à obtenir que Raphael travaille en direct pour son seigneur.
A la mort de Raphael, en 1520, le marquis François II, mort l’année précédente, avait laissé la place à son fils, Frédéric, qui, otage du pape, avait été élevé à Rome. Il y avait rencontré Raphael bien sûr mais surtout ses élèves, plus proches de lui par l’âge et il avait sympathisé notamment avec Giulio Romano. En 1520, le marquis Frédéric est à la cour de France, auprès de François 1er et il ne s’occupe guère des affaires de Mantoue qui sont gérées par sa mère, Isabelle d’Este.
Pendant trois ans, Giulio Romano est absorbé par l’immensité des tâches qui lui sont confiées à la villa Madama et au palais du Vatican. Mais, en 1521, Léon X est mort, laissant la place, le 9 janvier 1522, à un pape austère, Adrien VI, qui, au rebours de tous ses prédécesseurs, ne s’intéresse pas à l’art. Giulio ne reçoit aucune nouvelle commande.
Pour tromper son impatience, Giulio Romano exerce ses talents d’architecte en construisant successivement deux palais : la villa Lante sur le Janicule et le petit palais Maccarani sur la place Saint-Eustache à Rome, construit de 1519 à 1524, selon Vasari, pour Cristoforo Cenci avec la dot de son épouse. La villa Lante est construite pour l’ancien dataire du pape Léon X, Baldassare Turini, qui souhaite échapper à la chaleur des étés romains en profitant de la verdure du mont Janicule, alors couvert de vignes. La construction est commencée un peu avant la mort de Raphael, qui s’est sans doute défaussé de ce contrat sur son élève. Giulio travaille sans doute avec un autre architecte car la villa ne sera achevée qu’en 1531.
C’est sans doute après la mort de son maître, qu’il se rapproche de Michel Ange, l’éternel rival de Raphael, dont l’énergie plastique va considérablement influencer le style du peintre.
Il faudra attendre l’élection de Clément VII, le 19 novembre 1523, pour que de nouvelles perspectives se dessinent. Giulio Romano est certain qu’il sera privilégié entre tous, ayant beaucoup œuvré pour le cardinal Jules de Médicis à la villa Madama. Mais Baldassare Castiglione a profité de l’interrègne pour travailler l’élève de Raphael et finalement, le convaincre, de répondre à l’invitation à Mantoue, de la part de son maître, le marquis Frédéric, qui tient absolument à attirer à sa cour l’élève le plus talentueux du grand Raphael.
Dès l’élection du pape Clément VII, ce dernier, qui est l’un des grands et vieux amis de Baldassare, propose de le nommer son nonce apostolique à la cour impériale de Charles Quint, à Madrid. Début 1524, le comte de Castiglione prend la route de l’Espagne via Mantoue, accompagné de Giulio Romano, qui n’a pas attendu la réalisation des promesses de Clément VII, dont il connaît probablement très bien le caractère hésitant.
L’ambassadeur chevronné, qui est également l’oncle du grand amour du marquis Frédéric, Isabella Boschetti, alors proche d’accoucher, remet au marquis les plans d’un palais magnifique conçu par Michel Ange et que Frédéric envisage immédiatement de faire construire à Marmirolo, à côté du magnifique théâtre qu’il vient d’inaugurer. Il présente également son protégé à la cour. Le marquis et sa mère pensent avoir enfin trouvé avec le jeune disciple de Raphael, un successeur au grand Mantegna, disparu depuis dix-neuf ans déjà. Ils vont tout faire pour l’attacher à Mantoue, comme leurs prédécesseurs l’avaient fait pour Mantegna.
Le marquis évoque avec lui l’attribution d’une maison dans le Vicolo Leopardo, près de la basilique San’Andrea, à deux pas de la maison de Mantegna (voir l’article sur ce Blog sur Mantegna, le premier peintre du monde). Ce statut de peintre officiel de la cour va être confirmé par l’attribution de charges rémunératrices qui donnent au peintre une situation, une aisance financière, lui permettant de se consacrer entièrement à son travail de décoration. Comme le souligne l’article de Delphine Carrangeot en note VIII « il reçut la citoyenneté mantouane, devint préfet des fabriques ducales, et superiore delle strade », un titre dont l’équivalent serait la surintendance des constructions publiques à Mantoue. La rémunération correspondant à cette fonction est de cinq cents ducats par an, lorsque Mantegna n’en recevait, à son recrutement en 1459, que deux-cent-quarante et les architectes de Saint-Pierre, San Gallo et Baldassare Peruzzi, trois cents. Cette charge, qu’il obtient moins de deux ans après son arrivée, lui permet d’avoir la haute main sur tous les projets importants de la cité soit une fonction à la fois technique, politique et financière, qui en fait l’un des principaux officiers de la principauté.
Le charme du jeune homme, son heureux caractère, sa disponibilité, ses compétences variées dans les différents domaines de l’architecture, la peinture, mais également les sciences et techniques, notamment hydrauliques, achèvent de séduire le jeune marquis et sa mère qui sont désormais convaincus d’avoir mis la main sur le grand peintre qu’ils attendaient depuis la mort de Mantegna. Car le jeune homme se met en quatre pour illustrer ce que peuvent devenir les projets de son maître, qui en vient, très rapidement, à une nouvelle idée, celle de construire son propre palais, à proximité immédiate du centre de la ville. Son père avait eu le sien, avec le palais de San Sebastian. Le marquis décide de faire construire le sien, dans le même axe par rapport à Mantoue, en transformant d’anciennes écuries de son père, où ce dernier élevait ses fameux chevaux barbes qui enlevaient toutes les courses à Rome, Florence et Venise.
Un palais dans l’axe princier de Mantoue
Depuis 1459, Ludovic, l’arrière-grand-père du marquis actuel, depuis l’élévation de son fils au cardinalat, a désormais de hautes ambitions pour Mantoue : il veut transformer la ville médiévale afin de mieux célébrer la grandeur de sa famille.
Delphine Carrangeot a rédigé un remarquable article sur cette transformation urbaine de la ville de Mantoue[viii]. « La configuration urbaine de Mantoue se présente en cercles successifs. Au sein du premier cercle se concentrent les lieux du pouvoir spirituel (la cathédrale, l’évêché) et du pouvoir politique (le palais de la Commune, puis des seigneurs). Le second cercle abrite l’ancienne ville communale et marchande, dont l’identité s’affadit au XVe siècle devant l’affirmation du pouvoir seigneurial. Enfin, le troisième cercle est constitué d’une zone plus résidentielle, largement occupée par des espaces semi-ruraux, des vergers, des jardins et des possessions ecclésiastiques.
Dès les années 1460, le marquis Ludovic II entreprend une vaste politique de conquête de l’espace laissé vacant entre le second cercle et l’île du Té, où la famille Gonzague possède une vaste propriété destinée à l’élevage de chevaux. Il fait édifier par Leon Battista Alberti l’église San Sebastiano, près de la Porte Pusterla, elle-même à l’écart des parcours cérémoniels traditionnels de la ville et des circuits marchands. Le nouvel axe ainsi dessiné (depuis commodément surnommé « axe princier »), qui ne prenait appui sur aucune tradition urbaine, allait nécessairement apparaître comme un parcours voulu et dessiné par le Prince, et devait être jalonné de monuments à la gloire de celui-ci. Cette nouvelle grande voie de passage, tranchant dans l’ancien tissu urbain et créant un nouveau pôle résidentiel du pouvoir au sud, parachevait le contrôle dynastique sur la cité. Vers 1506 fut édifié le palais de San Sebastiano, et à partir de 1525, le palais du Té, au-delà de la Porte Pusterla, sur l’île du même nom ».
Le palais du Té
Un nom bien curieux pour ce palais, au sujet duquel de nombreuses explications ont été proposées. Le nom proviendrait de l’île sur laquelle le palais a été bâti, l’île « Tejeto », au milieu d’un grand marécage, aujourd’hui asséché, à deux km des murs de l’enceinte fortifiée de Mantoue, dont le nom aurait été abrégé, par l’usage, en Te.
Selon l’ouvrage de Quatremère de Quincy [ix] Le terme Te viendrait de la déformation ou la mutilation du terme tajetto ou tejetto, qui signifie, en langue vernaculaire, coupure, ou passage donné à l’écoulement des eaux. Cette dénomination locale, appliquée au terrain sur lequel le palais sera édifié, lui aura de fait communiqué son nom. Le marquis précédent, Francesco II y avait fait construire les écuries de ses fameux chevaux barbes, dont il supervisait l’élevage grâce à une petite maison qu’il avait fait construire à proximité, que Giulio Romano aura pour mission d’intégrer dans les plans de son palais.
D’ailleurs, cette définition colle bien avec la description donnée en note XII ci-dessous par David Mayernick, de la fonction de l’île du Té : « située entre les lacs est et ouest, l’île du Té est, fondamentalement, une digue qui contrôle l’écoulement des eaux du Mincio, de l’ouest vers l’est, autour de la ville de Mantoue. Au nord, un canal sépare le Té de la ville de Mantoue et de la porte Pusterla et au sud, s’étendent des marais ».
Pourquoi construire un palais princier ? Le marquis ne dispose-t-il pas de son palais dans le centre de Mantoue ?
En réalité, chaque prince de la maison Gonzague envisage, pour établir sa grandeur personnelle, de faire élever une demeure associée à son nom. Il y a déjà près d’une dizaine de villas, hôtels, demeures seigneuriales, châteaux, appartenant aux Gonzague, situés dans un rayon de trente à quarante kms autour de Mantoue. Le projet de Frédéric est d’établir un palais complètement nouveau, situé non loin de sa capitale et relié à la ville par cette succession de constructions de prestige, dont parle Delphine Carrangeot. Il veut pouvoir y accueillir ses hôtes prestigieux et en faire le centre symbolique d’exercice de son pouvoir. Son voisin, le duc Alphonse d’Este ne vient-il pas de faire construire sur une île du Pô, dix ans plus tôt, l’admirable palais du Belvédère (voir sur ce Blog l’article sur les palais disparus des princes de Ferrare) ?
En même temps, le marquis souhaite vivre non loin de sa maîtresse, Isabella, dont il est éperdument amoureux, pour laquelle, il a mis fin à son premier projet de mariage avec l’héritière du Montferrat. Il a vécu deux ans à la cour de François 1er et il sait qu’une favorite participe également du statut du Prince. Il lui faut une demeure dans le goût du temps, sur le modèle de ces belles villas romaines, qui fleurissent un peu partout autour des grandes villes.
Justement, il a sous la main l’architecte de deux des plus belles réalisations de l’époque, la villa Lante et la villa Madama, et qui a de surcroît très longuement travaillé dans la villa du banquier Chigi, qui ne s’appelle pas encore la Farnesina, non plus que les villas Lante et Madama. Cette proximité incite du reste à se poser la question de savoir si le choix du marquis n’a pas été quelque peu orienté par l’architecte, enclin à faire la démonstration de ses talents par l’édification ex nihilo d’un nouvel édifice, résultant de ses propres plans.
Car ce sont les plans de Giulio Romano et non ceux de Michel Ange, qui vont servir pour le palais du Té, dont la construction va démarrer en 1525 et s’achever dix ans plus tard, décorations comprises. Pour atteindre cet objectif, Giulio a été à bonne école avec Raphael. Il s’entoure immédiatement d’une équipe nombreuse d’artistes et d’artisans de talent, parmi lesquels on note la présence de Rinaldo Mantovano, de Fermo Ghisoni, Luca da Faenza, Anselmo Guazzi et Francesco Primaticcio.
Les plans de l’édifice revisitent, à la lueur des grands principes architecturaux de la Renaissance, le schéma de base d’une Domus romaine, avec une grande cour d’honneur, sitôt passée l’entrée monumentale et un corps principal de bâtiments sous la forme d’un quadrilatère en forme de carré de cinquante-cinq mètres, environ, de côté.
Selon le dossier pour L’Unesco, en note XIV ci-après, « le plan des bâtiments est constitué d’une première partie formée de quatre corps de bâtiments qui se développent autour d’une cour carrée centrale, la Cour d’Honneur, suivie d’un second jardin bien plus grand sur lequel avancent à gauche, l’harmonieuse construction d’un pavillon, appelé l’appartement du Jardin Secret, édifié en même temps que la bâtisse principale, et à droite “la petite maison du jardinier” et la longue façade des Compotiers. Le jardin est fermé par une exèdre: l’exèdre et les compotiers sont l’oeuvre de Niccolò Sebregondi qui est intervenu sur le complexe de Giulio à la moitié du XVIIème siècle ».
Depuis la grande cour, nous dit Quatremère de Quincy « on passe dans un vestibule que les Italiens appellent « loggia », qui s’ouvre sur le jardin. La façade de ce côté offre un péristyle de douze colonnes sur deux rangs en profondeur et accouplées. A l’entrecolonnement du milieu aboutit un pont qui sépare deux pièces d’eau ».
La salle du soleil
L’article de Letizia Ballestreri[x], sur le site Academia.edu, offre une analyse complète des peintures du palais du Té.
Le panneau central de la voûte de la salle du soleil est rempli par une fresque attribuée à Primaticcio, sur un dessin de Giulio Romano. Letizia Balestreri nous indique que « cette œuvre est particulièrement remarquable par le choix d’une contre-plongée, presque un plan zénithal, dont la perspective est renforcée par la représentation d’angles inhabituels. Le char du soleil, légèrement incliné, nous indique que le point d’observation correspond à l’entrée de la loggia. Le cadre de la fresque, se métamorphosant dans une fenêtre, ouvre idéalement l’espace du plafond. L’iconographie fait allusion aux thèmes du Crépuscule et de l’éternel écoulement du temps : la tombée de la nuit est représentée par les images du soleil couchant et du lever de la lune. On constate la présence d’Apollon sur le char du Soleil et de la même façon on retrouve Diane sur le char de la Lune ; la déesse, ancienne divinité italique, ne correspond pas seulement à Artémis (la déesse grecque de la chasse), mais elle est aussi la personnification de la lune ».
En ce qui concerne le char d’Apollon, poursuit l’auteur, « la bige du Soleil, un char antique à deux roues, attelé de deux chevaux de front, dont Apollon est dans ce cas l’aurige, est représentée dans l’instant où le conducteur, vu de dessous, en sortant de la scène principale semble s’envoler rapidement dans l’air s’accrochant à son char. Le peintre saisit l’image de la divinité incitant par le fouet les chevaux : le dynamisme de l’image est amplifié par les mouvements de ses vêtements et de son manteau, qui, soulevés per le vent, créent des courbes volumineuses. Le visage d’Apollon est auréolé par une aura de lumière à la structure rayonnée et aux multiples cercles concentriques, servant de métaphore visuelle du rôle de la divinité ».
La salle des œuvres
La salle des œuvres a été principalement décorée par Agostino da Mozzanica et Anselmo Guazzi, les deux élèves de Giulio Romano.
Letizia Ballestreri note que « l’impresa della Salamandra et l’impresa del guanto sont les deux scènes les plus célèbres parmi les fresques de la salle. Elles ont été réalisées par Agostino da Mozzanica : la première, l’Allégorie de la Salamandre est un des emblèmes récurrents du palais du Té, car la salamandre est le symbole personnel de Frédéric II. Dans le salon l’image se situe notamment sur la cheminée et sur les ornements du mur méridional. Ici elle s’accompagne de la devise latine : “Quod huic deest me torquet” (traduction de « Ce qui est absent en elle, tourmente mon esprit»). Ces mots font allusion au fait que cet amphibien mythique, employé comme symbole héraldique, était réputé vivre dans le feu et s’y baigner pour ne mourir que lorsque celui-ci s’éteignait. Toutefois pour Frédéric II de Gonzague le feu correspondait sans doute au feu de la passion amoureuse, à laquelle il ne pouvait pas se soustraire. La devise éclaire donc le tempérament sensuel du duc et son amour ardent pour sa maîtresse, Isabella Boschetti ».
Le Salon des Chevaux
Cette salle peut être considérée comme l’antichambre des appartements de Frédéric II de Gonzague. Elle inaugure la succession des salles publiques destinées à souligner la puissance des seigneurs de Mantoue.
Sur les murs, la peinture des destriers pur-sang est destinée à rappeler la fonction originelle de l’île du Té. Six chevaux, parmi les plus fameux des écuries du marquis, ont été dessinés, parmi lesquels Morel Favorito, le cheval préféré de Frédéric, mort le 19 octobre 1524. Son nom, Morel, dérive de la couleur de sa robe, voisine du gris foncé. Sa puissante musculature, un thème récurrent pour Giulio Romano, évoque la puissance du cheval, probablement donc, un destrier de guerre. Giulio Romano a dessiné lui-même les chevaux du duc qui ont été ensuite peints à fresque, selon Vasari, par ses deux élèves Benedetto Pagni et Rinaldo de Mantoue.
Letizia Ballestreri note que « les chevaux sont peints de profil, enchâssés dans de fausses architectures, entre des statues de divinités mythologiques, des figures historiques et des bas-reliefs peint à la sanguine, qui, simulant des bronzes, représentent de épisodes de l’histoire d’Hercule, rappelant au spectateur les vertus de Frédéric II. Quatre scènes appartiennent au cycle des Travaux d’Hercule (le lion de Némée, le taureau de Crète, l’Hydre de Lerne, le chien Cerbère placé en correspondance du portrait de Morel Favorito), alors que deux autres sont des aventures secondaires (l’Enlèvement de Déjanire, Hercule et Antée).
D’un point de vue stylistique, la peinture de Jules Romain dans cette pièce est d’un grand raffinement et proche des influences de la Renaissance tardive. Encore que très pâles, les couleurs utilisées sont lumineuses. Les vues en perspective et l’ornementation sont de grande qualité, ainsi que leurs géométries linéaires et solennelles. L’illusionnisme pictural se révèle dans l’évocation des architectures de style classiciste. La précellence de l’architecture sur les séquences de peinture témoigne de la suprématie hiérarchique de la salle qui est le salon d’honneur du palais, d’autant plus enrichi par la présence d’un plafond à caissons en bois sculpté et doré, et d’une monumentale cheminée rustique ».
La salle de Psyché
La pièce suivante est le salon d’honneur du palais. C’est ici que se déroulent les grandes manifestations, les fêtes et les banquets.
Toute la salle, murs et plafonds, va servir à l’évocation, plus fidèle chez Romano que pour Raphael (à la Farnesina), des thèmes de la vie de Psyché, tels qu’ils ressortent de l’Ane d’Or d’Apulée. Sur les murs, deux réceptions sont représentées : le banquet rustique et le festin des Dieux. Dans la structure de la narration sont insérés trois épisodes d’amours bestiales (Polyphème, Jupiter sous la forme d’un géant qui embrasse Olympia, Pasiphaé entre dans la vache construite par Dédale) et trois d’amour divin (Vénus et Mars se baignant, Adonis chassé de la chambre de Vénus et Bacchus consolant Ariane).
Letizia Ballestreri précise que « l’épisode décrit par la peinture de Giulio Romano représente le moment où Psyché, à l’instigation de ses sœurs jalouses, décide de découvrir le vrai visage de Cupidon, défiant ainsi son désir de rester caché. Psyché et Cupidon, souvent représenté comme deux jeunes gens ailés, sont aussi les protagonistes d’un mythe lié aux rites d’initiation et d’accès aux mondes infernaux. L’histoire de Psyché et de Cupidon a fasciné les hommes de la Renaissance, qui voyaient dans les vicissitudes des deux amants la métaphore du long et tortueux chemin de la connaissance menant l’âme à la rencontre du “Bien” absolu à travers l’Amour et donc par l’expérience, le sacrilège et le destin, la perte et la rédemption ».
L’histoire de la princesse aimée par Eros et persécutée par Aphrodite est une probable référence à la liaison entre Frédéric II et Isabella Boschetti, contrariée par les nécessités dynastiques de la principauté.
Le succès du mythe de Psyché à la Renaissance, qui est une légende relativement secondaire du poème de l’Ane d’or, provient de sa réinterprétation par l’école néoplatonicienne, dans le cadre de l’immortalité de l’âme. Le spécialiste de Giulio Romano, Fréderick Hartt, en se basant sur les Commentaires par Beroalde des métamorphoses d’Apulée, a proposé une interprétation néoplatonicienne du mythe : « le Désir et l’âme demandent la libération du monde terrestre, représenté ici par les amours des hommes et des dieux ».
Cette interprétation a été contestée par d’autres auteurs, qui ont voulu faire une lecture simplement érotique, du fait de la représentation de Bacchus et Ariane et d’Olympias et Jupiter qui ont en commun des relations adultères, une caractéristique partagée par le marquis et Isabella Boschetti, mariée et concubine du marquis : Isabella Boschetti pourrait donc avoir été représentée sous les traits de Pasiphae, qui refuse son mari en entrant dans la vache construite par Dédale ou davantage, d’Olympias, qui est séduite par Jupiter (le marquis Frédéric ?), auquel elle accepte de s’accoupler. La totalité des fresques de la salle, sous prétexte de présentation d’amours divines, ne sont qu’une succession d’amours contrariées. Comme si la référence n’était pas suffisamment claire, la présence dans la salle du symbole de la salamandre et de la devise de Frédéric, rappellent une fois de plus que le véritable sujet de la salle est l’histoire d’amour entre Isabella et Frédéric.
Cette interprétation me paraît beaucoup plus convaincante que celle d’inspiration néoplatonicienne, qui ne correspond ni au caractère du marquis, ni à celui de Giulio Romano. Ce dernier a, en effet, fait scandale, l’année même de son départ de Rome, par ses dessins, gravés par son ami Marc Antoine Raimondi, qui ont circulé parmi les cardinaux et qui ont fait l’objet, ensuite, par bravade, des Sonnets luxurieux[xi] de Pietro l’Aretino. Les estampes copulatoires, ont fait scandale à Rome dans l’entourage du pudibond Clément VII et Giulio Romano n’a dû qu’à la protection de Frédéric, de n’être pas emprisonné, comme Marc Antoine Raimondi, par le dataire Ghiberti. Du reste ces estampes ne sont pas plus suggestives que la peinture de Jupiter et d’Olympias de la chambre de Psyché, qui est loin, très loin, de l’évocation de l’âme néoplatonicienne. La réalisation de cette fresque, quelques années après, montre que le marquis n’est pas très soucieux de l’opinion de l’entourage du pape, opinion qu’il ne peut ignorer et qui pourrait donc participer de l’affirmation de sa souveraineté, l’empereur Charles Quint venant de l’élever au titre de duc du Saint Empire, en 1530.
La salle adjacente au salon de Psyché, la salle des Vents, est consacrée à l’astrologie : les seize médaillons figurant les signes du zodiaque, expliquent comment la vie humaine est influencée non seulement par les signes du zodiaque, mais encore par la constellation au moment de la naissance des individus. La Salle des Aigles, qui suit, est la chambre du marquis Frédéric. La fresque centrale du plafond illustre la chute de Phaëton du char du soleil. Le vestibule qui suit (ou loggia), selon Letizia Balestreri, « inaugure un changement radical dans le choix des sujets et des motifs ornementaux ». La loggia de David, représente des épisodes tirés de l’histoire de David, selon l’ancien testament. C’est l’occasion pour Giulio Romano, de faire figurer l’empereur Charles Quint, dans le panthéon des dieux et des héros, sans doute sur la demande expresse du marquis, qui vient d’être élevé duc de Mantoue en 1530.
Du vestibule on entre dans la Chambre des Stucs, « constituée uniquement par des reliefs en stuc blanc. Les représentations monochromes sur les murs et sur la voûte, avec des scènes de bataille, communiquent à l’observateur des sensations de silence et d’abstraction. Ils sont une allusion explicite à la personne du commanditaire et à la souveraineté impériale. Il s’agit donc d’un hommage explicite à Charles-Quint en remerciement du nouveau titre de duc de Mantoue ».
La chambre des Empereurs qui suit, « est dominée par des sujets héroïques et les exemples du bon gouvernement. Les sujets expriment la volonté de Frédéric II de célébrer la pensée et la conduite d’un prince moderne qui sait gouverner et combattre, en s’inspirant de la culture classique et des exemples de justice du monde antique. Huit portraits d’empereurs se déploient autour du grand panneau central qui exalte la grandeur d’âme de Jules César, illustrée par un épisode tiré de la Naturalis Historia de Pline l’Ancien : après la victoire de Pharsale, César s’empare des coffrets contenant les lettres de Pompée, mais il refuse de les lire et donne l’ordre de les brûler ».
On débouche enfin sur la salle la plus connue du palais du Te, la fameuse salle des Titans.
La salle des Titans
Laissons la parole à Quatremère de Quincy, pour décrire cette salle. « La dernière salle est la plus célèbre de toutes par l’invention extraordinaire de sa décoration. De quelle forme est cette pièce ? C’est ce que l’œil ne saurait apprendre : la peinture, en s’emparant de toutes les superficies, ayant réussi, par l’illusion de la couleur et de la perspective, à faire disparaître toutes les lignes qui en détermineraient la configuration. Aussi, quelques-uns ont cru qu’elle formait un cercle, quand elle est un carré long dont les angles, sont, à la vérité, légèrement arrondis. Cette salle est ce qu’on appelle la salle des Géants, idée neuve et d’une conception aussi hardie que l’exécution en est prodigieuse. La peinture a fait disparaître entièrement son fond, par la magie même de sa composition. Une fois entré dans ce local, le spectateur n’y voit plus d’issue. Il n’est environné que de rochers précipités sur les géants, écrasés. Le sol même est composé de débris. Le plafond c’est l’Olympe, d’où Jupiter lance la foudre ».
Les sources littéraires du mythe des Géants, se trouvent, d’après Letizia Balestreri, dans la Théogonie d’Hésiode, dans le premier livre des Métamorphoses d’Ovide et dans les Fastes. Jupiter, du haut des cieux bombarde avec la foudre que lui tend Junon, les Titans qui ont tenté de monter à l’assaut de l’Olympe.
L’intérêt particulier de cette représentation des Titans est qu’ils sont représentés sous la forme de géants, alors que dans le texte initial d’Ovide, ce sont des monstres aux mille bras. La présence de singes dans cette fresque, ce qui est une nouveauté, s’explique, selon Letizia Balestreri, relayant d’autres auteurs, par une erreur d’interprétation du texte d’Ovide, dans la version utilisée par Giulio Romano.
Certains auteurs ont voulu voir dans ce combat des titans, une allégorie du soulèvement des principautés italiennes contre l’Empire, terrassées par l’empereur Charles Quint. Charles-Quint serait donc Jupiter, triomphant de tous ses ennemis. La présence de l’aigle, attribut du pouvoir impérial et emblème des Gonzague, serait ainsi l’occasion pour le duc de Mantoue de faire sa cour à l’empereur, qui est passé trois fois à Mantoue, en 1530, où il peut admirer la salle de Psyché que Giulio et ses élèves viennent de terminer, en 1532 et en 1535. Il séjourne, lors de ses trois passages, au palais du Té.
Comme le souligne le dossier de l’UNESCO, la chambre des Géants est d’abord une mise en scène théâtrale, destiné à surprendre et provoquer : « l’émerveillement que suscitait et suscite toujours la Chambre des Géants ne tient pas seulement à la peinture qui renie l’existence de la pièce et place le spectateur au centre d’un drame. Cette boîte capricieuse, par son architecture même, est dotée de jeux acoustiques tout aussi étranges et amusants tandis que sont aujourd’hui perdus les effets de la cheminée, démontée et fermée à cause des infiltrations d’humidité et du plancher original, pavé de petits cailloux mis sur la tranche, et sur lesquels chancelait le visiteur qui entrait presque dans l’obscurité, à la lumière du feu de cheminée ou des torches ».
Ce qui permet à Letizia Balestreri de conclure, relayant une observation de Frédérick Hartt : « dans son élan visionnaire, Jules Romain a créé l’un des chefs-d’œuvre absolus du maniérisme européen. Il s’est sans doute inspiré des Salles du Vatican de Raphaël et de la vision titanesque de l’homme qu’on peut trouver chez Michelangelo Buonarroti. L’œil continue de se déplacer sans relâche d’un point à un autre dans la salle, ne trouvant pas de repos à cause de la multiplicité des points de fuite ».
A mon sens, la peinture des Dieux de l’Olympe paraît beaucoup plus proche, dans son énergie et son inspiration, des fresques de la chapelle Sixtine, peintes par Michel Ange de 1508 à 1512, que de celles de Raphael dans ses Stanze. Là où la continuité avec Raphael paraît la plus marquée, c’est dans la place réservée aux Dieux, dans la décoration du palais du Té, très proche de l’esprit de Raphael pour la salle de Psyché dans la villa Farnesina, pour lequel l’Ane d’or d’Apulée n’est qu’un prétexte et l’Olympe, le sujet principal. Il n’est pas exclu d’imaginer que le travail de Giulio Romano dans la chambre des Titans, achevé en 1535, ait permis à Michel Ange, admiratif de s’en inspirer, pour la peinture du jugement dernier de la chapelle Sixtine, de 1535 à 1541.
Le génie de Giulio Romano au palais du Té
La présentation précédente a fait la part belle au traitement épisodique de l’iconographie. Les peintures sont époustouflantes, certes, mais, pour autant, elles ne mettent pas en valeur le génie particulier de Giulio Romano qui, d’ailleurs, a largement recouru au talent de ses élèves et notamment du Primatice.
Un article de David Mayernick[xii], sur le site Academia.edu, « The winds in the corners. Giulio Romano : the elements and the Palazzo Te’s Fall of Giants » corrige cette première impression.
L’auteur s’oppose tout d’abord à l’interprétation allégorique assimilant Charles-Quint à Jupiter, l’empereur étant venu châtier les principautés italiennes en révolte contre son autorité. Pour l’auteur, au contraire, les géants, qui sont du type physique des peuples d’Europe du nord, désignent davantage les troupes luthériennes de l’empereur, qui viennent de saccager Rome (voir sur ce Blog, l’article Ce jour-là, le 6 mai 1527, le sac de Rome), quelques années plus tôt. Comment Charles Quint, qui a assisté à tout le travail d’élaboration des fresques, de 1530 à 1535, pourrait-il être encore surpris des peintures du palais du Té ? Le traitement érotique tout-à-fait particulier des fresques de la salle de Psyché est-il d’ailleurs dans le goût de Charles Quint, qui n’a que mépris, dès lors qu’il est marié, pour les relations extra conjugales ?
Du reste, on pourra se faire l’observation que, venu à Mantoue le 27 mars 1530, Charles-Quint y découvre, non pas le génie de Giulio Romano, mais celui du Titien, présent au palais ducal, à travers deux portraits de Pietro l’Aretino et du patricien Adorno, que le Titien avait adressé au marquis, deux ans auparavant (voir l’article sur Isabelle d’Este ou l’art d’être femme à la Renaissance). Charles-Quint a-t-il été choqué par le contenu trop explicite des fresques de Romano au palais du Té ?
Ce qui fait la particularité du génie du Palais du Té, c’est pour l’auteur, l’intégration de la peinture et de l’architecture. Quatremère de Quincy avait fait du reste, la même observation. L’auteur souligne à ce sujet que si l’inspiration de Romano est venue du palais Chigi, à Rome, elle est davantage liée au traitement par Baldassare Peruzzi, le peintre et architecte siennois, de la Sala delle Prospective au premier étage de la villa, qui intègre chaque emplacement du mur dans un trompe l’œil, une illusion de vision sur la campagne environnante.
L’auteur estime que la totalité du projet, a été entièrement conçue, par intégration de la peinture et de l’architecture.
Giulio Romano n’en est pas à un coup d’essai. C’est sa troisième réalisation, après les villas Turini (Lante) et Medici (Madama). Et ce qui lui permet d’achever la totalité de la construction, peintures comprises en dix ans seulement, c’est l’exceptionnelle légèreté de l’ouvrage.
L’auteur souligne, après Vasari, que les fresques de la salle des Géants, ont une « double fondation ». Car les terrains d’assiette, situés sur des fonds marécageux, sont mouvants. La construction à cet endroit d’un palais est donc une tâche herculéenne, qui excite autant le talent que l’ingéniosité de Giulio Romano et qui suggère le thème iconographique de la salle.
Au Palais du Té, Giulio Romano a triomphé des imperfections du site par de prudentes et doubles fondations, des murs épais, des matériaux légers et un poids modeste. Il réutilise l’ancienne bâtisse qu’il fond intégralement dans la nouvelle afin de mieux la stabiliser et il se sert de briques revêtues de stuc pour former ses colonnes et ses chapiteaux, les fenêtres et tous les autres ornements de l’édifice. D’ailleurs, le projet a commencé, anecdotiquement, par les fresques de la salle des chevaux. Et c’est à partir de là que le projet de palais à construire, s’est imposé au marquis.
Dans ce palais, les matériaux lourds, les pierres massives : tout n’est qu’illusion.
Mais il y a un sens particulier à cette architecture si originale, qui représente selon Serlio, « le modèle des palais de notre temps », comme le révèle le dossier de classement de Mantoue pour l’UNESCO : « un autre thème central de l’édifice est comme nous l’avons dit, la signification de l’œuvre rustique utilisée avec amplitude exceptionnelle et de manière très variée dans les parements muraux du palais, associée de manière inusitée aux ordres classiques. C’est le rustique, expression de la matière primitive, et donc œuvre de la nature, qui contraste intimement avec l’architecture, œuvre de l’esprit rationnel. Lors du passage d’un stade à l’autre, on peut presque lire un infini, comme si en creusant successivement la matière, l’architecte, comme le sculpteur, accédait à une forme encore cachée ».
Le deuxième fondateur de Mantoue
Vasari, après les vingt années de travail de Giulio Romano, a comparé Mantoue ville “où autrefois on vivait continuellement dans la boue et la fange” à une nouvelle Rome, par “la bonté de l’esprit et la valeur de son intelligence merveilleuse” comme le rapporte le dossier de l’UNESCO. Quelques exagérés que puissent être ces propos, ils reflètent tout-de-même le coup de fouet donné à l’aménagement urbain de Mantoue, tant les interventions de l’artiste prodigieux y sont multiples.
En sa qualité de peintre et décorateur officiel du marquisat, puis du duché, il entre dans les fonctions de Giulio, qui succède ainsi à Mantegna, de préparer les grandes entrées des souverains, d’édifier les divers monuments provisoires pour accueillir les hôtes de prestige. Il est ainsi directement sollicité pour les trois entrées successives de Charles-Quint en 1530, 1532 et 1535, comme le raconte Vasari[xiii] : « lorsque l’empereur Charles-Quint passa à Mantoue, Giulio Romano construisit plusieurs arcs de triomphe, composa des décorations de théâtre et quantité d’autres magnifiques appareils, pour lesquels il n’avait point d’égal. Personne ne sut, mieux que lui, arranger des mascarades et inventer des costumes extraordinaires pour les joutes, les fêtes et les tournois. Mantoue, jadis sale et fangeuse au point d’être presque inhabitable, devint, grâce à Jules Romain, aussi saine qu’agréable. Elle lui dut la plupart de ses embellissements, chapelles, maisons, jardins, façades. Les digues du Mincio s’étant rompues un jour, les quartiers bas de la ville se trouvèrent couverts de quatre brasses d’eau, les grenouilles y séjournaient à peu près toute l’année. Jules avisa aux moyens de remédier à ces inconvénients, et agit de façon que les eaux reprirent leur cours naturel et même, pour parer à une nouvelle inondation, il fit élever les rues qui bordent le fleuve, et ordonna la démolition d’une foule de petites habitations, mal bâties et de peu d’importance, pour les remplacer par de grandes et magnifiques maisons, qui devaient contribuer à l’embellissement de la ville. Plusieurs particuliers s’y opposèrent, et dirent au duc que Romano, par son projet, leur causait une trop grande perte, mais le prince ne voulut écouter personne, et enjoignit même de ne rien construire sans l’ordre exprès de Giulio »…
La confiance dont le peintre-architecte bénéficie, de la part de son souverain est largement justifiée. Aussitôt le Palais du Té achevé, Giulio Romano s’est attelé à la réparation et à l’aménagement du palais ducal, pour le mariage du duc avec Margerita Paleologue, l’héritière de la principauté du Montferrat (comme le raconte l’article de ce Blog sur Isabelle d’Este ou l’art d’être femme à la Renaissance).
Comme le précise le dossier de de demande de classement de Mantoue auprès de l’UNESCO[xiv] « ces édifices donnant sur le lac, sont reliés au Château de San Giorgio et vont occuper pratiquement la zone vide située entre le château et la Domus Nova. Pour chacun d’entre eux, Giulio sera chargé de la conception, du projet, de la construction et du dessin de la décoration, selon une méthode de travail qui lui vient de Raphaël et qui est clairement liée à la diversité de son art.
C’est au mariage du duc avec Margherita Paleologa en 1531 que remonte la construction d’un pavillon pour la mariée, devant le château, auquel il était relié: L’édifice, amplement cité dans les documents a été démoli à la fin du XIXème siècle. Entre 1536 et 1539 ce fut le tour de « l’appartement de Troie ». Celui-ci devait être la nouvelle résidence de Federico, nommé duc en 1530 par l’empereur Charles V. L’appartement, abîmé aux époques suivantes, alterne les espaces “publics” et d’apparat et les pièces “privées”, selon la conception propre à Giulio. Tandis que cet appartement est en construction, en 1538 commencent, en face, les travaux d’un autre édifice : la “Rustica”, caractérisée, au rez-de-chaussée par un portique aux arcs de bossage rustique, qui sera repris à Fontainebleau dans la grotte des Pins, auquel se superpose un ordre de demi-colonnes torses adossées au mur de bossage et alternées de fenêtres. La mort du duc Federico en 1539 ralentit les travaux qui seront portés à terme seulement après le décès de l’artiste en 1546, par Giovan Battista Bertani ».
L’appartement de Troie est une succession de salles du palais ducal destinées à l’usage personnel et public du souverain de Mantoue. La salle de Troie est unique au sein de l’appartement : elle est réservée aux audiences publiques et elle est décorée d’après diverses scènes tirées de la guerre de Troie selon Homère. La voûte, selon une spécialisation devenue maintenant classique, depuis le palais du Té, est réservée aux dieux de l’Olympe. Les murs sont le domaine des héros et des mythes. Parmi celles-ci, trône le Laocoon, une fresque inspirée de la célèbre statue découverte sous le règne du pape Jules II, qui a frappé l’adolescent Giulio Pippi (voir l’article de ce Blog sur le Laocoon, coup de tonnerre sur l’art de la Renaissance) et pour laquelle Frédéric avait montré un large intérêt. Toute cette salle paraît du reste établie sur le thème de la continuité entre les souverains de Mantoue, par l’illustration de scènes évoquant le passage de la responsabilité du père au fils : ainsi de la remise des armes à Achille ou dans les figures d’Hécube, Thétis et Vénus, inquiètes pour le sort de leurs héritiers respectifs.
Giulio Romano ne laisse en outre à personne d’autre (y compris la mère du duc, Isabelle d’Este), le soin de choisir les décorations des appartements des souverains qui sont ensuite réalisées par ses élèves.
Puis, il fait construire un palais à Marmirolo, à quelques km de Mantoue, à proximité du théâtre bâti une douzaine d’années plus tôt : est-ce sur les plans de Michel Ange, apportés par le comte de Castiglione ? Il orne, en tout cas, ce palais aujourd’hui disparu, de magnifiques fresques.
Dans cette période d’intense activité créative, Giulio Romano est partout à la fois. Il fait travailler Rinaldo de Mantoue, d’après ses dessins, dans la chapelle d’Isabella Boschetti, et il réalise de nombreux tableaux pour des clients, des amis ou pour les cadeaux diplomatiques du duc. Il réalise, à la demande du duc des dessins pour des tapisseries flamandes que le duc a commandées.
A peine le duc émet-il une idée ou un souhait que Romano élabore le croquis, le schéma ou le dessin qui permet de transformer l’idée en projet. Tant de dévouement, de travail, finissent par souder indéfectiblement le maître et le serviteur qui deviennent inséparables. Giulio Romano a pratiquement doublé ses revenus à mille ducats par an. C’est l’un des principaux officiers de la principauté et l’homme de confiance du duc. Il est temps pour lui de prendre pignon sur rue.
La maison de Giulio Romano à Mantoue
La maison de Giulio Romano à Mantoue, a fait l’objet d’un article très approfondi de Delphine Carrangeot, déjà évoqué en note VIII. Laissons-lui la parole : « Après avoir occupé diverses demeures mises à sa disposition par Frédéric II, l’artiste fit l’acquisition le 22 mars 1538, pour la somme de 1000 écus d’or, d’une maison bâtie au début du siècle ayant appartenu aux Ippoliti, une famille de la vieille aristocratie mantouane proche des Gonzague, ce qui renforçait d’autant le statut social supérieur auquel l’artiste s’était hissé. Située à quelque 200 mètres au nord de celle de Mantegna, et légèrement en retrait de l’axe princier, dans le quartier de la Licorne (de l’« Unicorno »), la bâtisse s’élève à mi-chemin entre le cœur du pouvoir politique et le palais du Té – qu’il avait fini de bâtir et décorer moins de six ans auparavant. La propriété présentait l’avantage de se situer à la limite de la ville, et d’être tournée vers les vastes espaces appartenant aux Gonzague intra-muros, et le long de l’axe princier.
« Il quitta donc sa maison du « second cercle », pour résider dans le nouveau quartier des élites courtisanes, le long de l’axe princier. Et de fait, il semble que l’artiste y ait vécu sur un pied princier ainsi que le résume Vasari, qui visita la ville en 1544 : « … le duc appréciait tant le talent de Jules Romain qu’il ne pouvait vivre sans lui ; en échange, l’artiste eut pour lui la plus grande révérence. Il ne demanda jamais de faveurs, pour lui-même ou pour d’autres, sans les obtenir. Au moment de sa mort, il possédait plus de 10 000 ducats qu’il avait reçus du duc. Il construisit sa propre maison à Mantoue, en face de l’église San Barnabà, avec une extraordinaire façade de stucs peints ; l’intérieur était aussi orné de stucs et décoré de nombreuses antiques venues de Rome ou cadeaux du duc, auquel il donna quelques-unes des siennes. ».
« Davantage qu’une construction, il s’agit de la transformation d’une demeure bourgeoise, dont l’architecte remodela la façade afin qu’elle corresponde à sa position sociale exceptionnellement élevée pour un artiste de cour. Les travaux de transformation et de décoration interne et externe ne commencèrent certainement qu’en 1539, voire 1540, lorsque la mort de Frédéric II lui donna suffisamment de temps pour se consacrer à ses propres projets. Ils se poursuivirent jusqu’en 1544, date de la visite de Vasari, et deux ans seulement avant la disparition prématurée de l’artiste, âgé de quarante-sept ans ».
La façade que conçut Jules Romain était radicalement nouvelle par rapport à celle préexistante ; par sa façade et son décor, elle pouvait évoquer l’atmosphère des villas romaines. (…) Au premier regard, il était évident qu’il s’agissait de la résidence d’un courtisan de haut rang, qui de surcroît affichait sa profession et le rôle qu’il avait joué dans la transformation des palais princiers, dont il reprenait les codes, en y ajoutant la figure de Mercure ».
Vasari précise que « parmi les morceaux rares que renfermait sa maison, se trouvait un portrait d’Albert Durer, peint à la gouache et à l’aquarelle sur une toile extrêmement fine, par cet artiste lui-même, qui l’avait envoyé en présent à Raphaël ».
Les dernières années
La mort en 1540 du duc Frédéric, qu’il a passionnément aimé, est pour l’artiste un cruel déchirement. Il n’a plus goût à rien et il veut quitter Mantoue, définitivement, pour repartir à Rome. Mais il est retenu par le cardinal de Gonzague, le frère du duc, qui assure la régence pendant la minorité du prince Frédéric III. Ce dernier, pour convaincre l’artiste de rester à Mantoue, lui propose un grand projet, celui de restructurer l’intérieur de la vieille cathédrale gothique de Saint-Pierre de Mantoue, qui menaçait ruine après un incendie. Le savant et humaniste abbé de San Benedetto à Polirone (à vingt km au sud de Mantoue), qui sera créé cardinal deux ans plus tard, Gregorio Cortese, confie à Giulio Romano, le même travail sur l’église de l’abbaye. Ces deux grands défis architecturaux ont pour effet de revigorer l’artiste dépressif.
Pour la première fois de sa vie, Giulio Romano se trouve confronté à des problématiques architecturales religieuses. Il doit habiller au goût du jour l’apparence d’édifices anciens, en modifiant complètement leur agencement intérieur.
A Saint-Pierre, le talent de Giulio Romano va se limiter au réagencement intérieur, comme le souligne le dossier pour l’UNESCO : « les cinq nefs sont séparées par des colonnes corinthiennes ; la nef centrale, plus haute, est recouverte de caissons dorés comme les deux nefs extérieures, tandis que les deux nefs intermédiaires sont fermées par une voûte en berceau ». L’apparence au XVIème sièce, de la cathédrale, profondément remaniée au XVIIIème siècle, peut être visualisée à travers le tableau de Domenico Morone, ci-dessous.
A Polirone, en revanche, l’artiste va complètement reprendre l’extérieur. Giulio adopte le système de Bramante à la cour du Belvédère, d’arches triomphales. A l’intérieur, il conserve la voûte du treizième siècle mais il reprend complètement le système gothique des arc-boutant en s’inspirant des principes des premières basiliques chrétiennes.
En 1544, Giorgio Vasari, l’auteur des Vies des architectes, peintres et sculpteurs se déplace à Mantoue où il est accueilli chaleureusement par un vieillissant Giulio Romano (est-il déjà malade ?) qu’il ne connaît pas encore, mais avec lequel il entretient déjà, depuis quelques temps, une étroite correspondance. Vasari raconte ainsi en se positionnant comme César à la troisième personne, sa rencontre : « les deux artistes, qui ne s’étaient jamais vus auparavant, se reconnurent aussitôt comme s’ils eussent déjà vécu longtemps ensemble. Giulio Romano, enchanté, ne quitta pas un moment Giorgio pendant quatre jours. Il lui montra tous ses ouvrages, et les plans des anciens édifices de Rome, de Naples, de Pozzuolo, de Campagna et de toutes les antiquités les plus célèbres, dont il avait dessiné lui-même une grande partie. Ensuite il ouvrit une grande armoire, et en tira les plans de toutes les constructions qui avaient été élevées d’après ses dessins et par son ordre, à Mantoue, à Rome et dans toute la Lombardie. Je crois qu’il est impossible d’avoir des idées plus neuves, plus belles et mieux entendues en fait d’architecture. Le cardinal ayant demandé à Vasari ce qu’il pensait des ouvrages de Jules Romain, il répondit, en présence même de Jules, que leur auteur méritait qu’on lui élevât des statues dans toutes les rues de la ville, et que la moitié de l’état de Mantoue ne suffirait pas pour récompenser ses travaux et ses talents. Le cardinal répartit que Jules était plus maître de l’Etat que lui-même »….
En 1546, l’architecte Antonio de San Gallo, le jeune, qui exerce à Rome une fonction identique à celle de Giulio Romano à Mantoue, meurt début août 1546. Le pape après quelques recherches, songe à Giulio Romano, auquel il va faire une offre difficile à refuser. Rien ne peut retenir l’artiste de Mantoue. L’appel du pape et de Rome est trop fort. Il liquide quelques affaires en cours et se prépare à partir, lorsqu’une maladie, très courte, vient mettre fin à ses jours.
Giulio Romano s’éteint le 1er novembre 1546, à l’âge de cinquante-quatre ans, selon Vasari. Il est enterré en l’église San-Barnaba. Ses anciens élèves veulent lui élever un monument mais son fils unique, Raphael nommé en l’honneur de son défunt maître, va mourir quelques années après, trop tôt pour qu’une décision soit prise quant au monument funéraire, de sorte que la lignée du grand artiste de Mantoue restera sans postérité, à l’exception de deux filles, Virginia et Griselda, la première épousera Ercole Malatesta et la seconde prendra le voile.
Le système architectural développé par Giulio Romano à Mantoue n’apporte rien de nouveau à l’architecture romaine où il est déjà pratiquement obsolète. Il aura donc peu de répercussions en Italie, l’avant-garde artistique de l’Europe, où il ne sera guère copié. En revanche le style mantouan va essaimer en Europe à Fontainebleau, via l’élève de Giulio Romano, le Primatice, et, en 1536, sur le palais du duc de Bavière, à Landshut.
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[i] Histoire de la vie et des ouvrages des plus célèbres architectes par Quatremère de Quincy (Antoine-Chrysostome). Histoire des Peintres de toutes les Ecoles, collection dirigée par Charles Blanc, Ecole Ombrienne et Romaine, Paris Renouard 1870. La vie des meilleurs peintres sculpteurs et architectes par Giorgio Vasari Livre GALLICA-BNF-INHA pages 43 et suivantes. Le Palais du Té Ugo Bazzotti chez SEUIL. Raphael and Giulio Romano: With Notes on the Raphael School Frederick Hartt The Art Bulletin Vol. 26, No. 2 (Jun., 1944), pp. 67-94. Sacrae historiae acta a Raphaele Urbin in Vaticanis xystis ad picturae miraculum expressa / Nicolaus Chapron Gallvs a se delimata et incisa Gravures de Nicolas Chapron 1612 Les Loges de Raphael Reproductions
[ii] Essai sur les fresques de Raphaël au Vatican, par F.-A. Gruyer. Chambres [-Loges] Paris Renouard 1859. Livre GALLICA BNF. Choix des plus célèbres maisons de plaisance de Rome et de ses environs / mesurées et dessinées par Charles Percier et P.-F.-L. Fontaine Didot 1809. Livre GALLICA BNF.
[iii] Raphael et la Farnésine par Charles Bigot Paris Gazette des Beaux-Arts 1884 Livre sur Archive Internet.
[iv] La vie de Philostrate Site Remacle.
[v] Le conte de Psyché dans les métamorphoses de l’Ane d’Or d’Apulée.
[vi] Encyclopédie Méthodique Architecture Tome troisième, Paris 1825 Livre Google book.
[vii] Eugene Müntz Raphael, sa vie, son œuvre, son temps Paris Hachette 1900 Livre Archive Internet.
[viii] Les artistes et leurs résidences dans l’espace urbain Mantoue, capitale des Gonzague mi XVe-mi XVIe siècle par Delphine Carrangeot, Site Cairn de la Société française d’histoire urbaine, Histoire Urbaine 2009/3 n°26.
[ix] Histoire de la vie et des ouvrages des plus célèbres architectes Antoine Chrysostome Quatremère de Quincy Paris Renouard 1830 Livre Google Books.
[x] Jules Romain et le Palais du Te à Mantoue par Letizia Ballestreri Université d’Etat de Milan sur le site Académia.edu . Cet article s’appuie principalement sur l’ouvrage très documenté de Ugo Bazzotti chez SEUIL 2012 Le Palais du Té à Mantoue.
[xi] Pierre l’Aretin Les Sonnets Luxurieux Livre Gallica BNF.
[xii] David Mayernick «The winds in the corners. Giulio Romano : the elements and the Palazzo Te’s Fall of Giants ». site Academia.edu.
[xiii] Vie des Peintres, sculpteurs et architectes VASARI, Tome Cinquième Paris Just Tessier 1839 Site de l’INHA.
[xiv] Dossier Mantoue et Sabbioneta : Proposition d’Inscription à la Liste des Biens Culturels et Naturels du Patrimoine Mondial de l’UNESCO Nomination Italie 2007.
naumovic a écrit
Bonjour,
Avez-vous dans vos notes quelques informations concernant Francesco da Sangallo dans les années 1530, plus précisément entre 1534 et 1536 ? Lisez-vous l’italien et allez-vous parfois consulter les archives ou compilez-vous les informations déjà publiées ?
D’avance merci.
Cordialement vôtre,
Anne Naumovic
Philippe a écrit
Bonjour Anne,
Je n’ai pas encore fait d’étude sur Francesco da Sangallo. Je n’ai fait que le citer dans mon étude sur le Laocoon.
J’ai fait une petite recherche et je peux vous proposer
“Les médailleurs italiens des quinzième et seizième siècles. Tome 1 / par Alfred Armand,…”
Lien https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6381310v/texteBrut
“Les San Gallo : architectes, peintres, sculpteurs, médailleurs, XVe et XVIe … Clausse, Gustave”
lien https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9690048k.r=Francesco%20da%20Sangallo?rk=21459;2
Vous aurez déjà avec ces deux ouvrages que vous pouvez télécharger gratuitement sur le site de la BNF, toutes les infos de bases sur les 3 Sangallo et, sans doute, le détail des oeuvres du 3ème Sangallo entre 1534 et 1536, sous le pape Alexandre Farnese Paul III, c’est-à-dire avant qu’il ne devienne maître d’oeuvre du chantier de Saint Pierre à Rome.
A l’aide de la bibliographie qui figure en fin d’ouvrages, vous pourrez remonter à toutes les sources requises et les télécharger.
J’espère vous avoir été utile
Bien cordialement
Philippe
Philippe a écrit
Anne,
J’ajoute que vous pouvez télécharger les 3 volumes des Sangallo sur le site Archive.org avec la recherche Gustave Clausse en cliquant sur les liens suivants:
https://archive.org/details/lessangalloarch02claugoog/page/n6
https://archive.org/details/lessangalloarchi02clauuoft/page/n10
https://archive.org/details/lessangalloarch00claugoog/page/n11
Philippe a écrit
Anne,
J’ajoute que vous pouvez télécharger les 3 volumes des Sangallo sur le site Archive.org avec la recherche Gustave Clausse en cliquant sur les liens suivants:
https://archive.org/details/lessangalloarch02claugoog/page/n6
https://archive.org/details/lessangalloarchi02clauuoft/page/n10
https://archive.org/details/lessangalloarch00claugoog/page/n11