
Boccace De mulieribus claris Traduction Laurent de Premierfait Illustrations Robinet Testard Français 599, fol. 45v, Athalie et soldat(s) BNF
Il s’agit du quarante-neuvième portrait de la galerie des cent-six Cleres et nobles femmes de Boccace, qui aborde ici un épisode de la bible, celui de la reine de Judée, Athalie.
Flavius Josephe, historien juif du 1er siècle de notre ère, dans les Antiquités Judaïques, raconte son histoire[i] :
« Quand Athalie, la fille d’Achab, apprit la mort de son frère Joram et de son fils Ochozias et la destruction de la famille des rois, elle s’efforça de ne laisser survivre personne de la famille de David et d’en exterminer toute la race, pour qu’il n’y eût plus à l’avenir un seul roi issu de lui. Elle accomplit son dessein comme elle l’avait conçu ; cependant il survécut un fils d’Ochozias. Voici de quelle façon il échappa à la mort.
Ochozias avait une sœur consanguine, qui s’appelait Josabeth(é) ; elle était mariée au grand-prêtre Joad (Jodaos). Ayant pénétré dans le palais royal, et trouvant, au milieu des victimes égorgées, Joas, — tel était le nom de l’enfant, — âgé d’un an, caché avec sa nourrice, elle l’emporta avec elle et les enferma dans le grenier aux lits ; puis, en secret, elle et son mari Joad les nourrirent dans le sanctuaire pendant les six ans qu’Athalie régna sur Jérusalem et sur les deux tribus.
La septième année, Joad, ayant mis dans le secret quelques centurions, au nombre de cinq, les persuada de s’associer à une tentative qui serait faite contre Athalie, afin de revendiquer le trône pour l’enfant. Après avoir reçu les serments par lesquels des conjurés se donnent mutuelle assurance, il s’enhardit dès lors dans ses espérances contre Athalie. Les hommes que le prêtre Joad avait mis dans sa confidence parcoururent tout le pays, en réunirent les prêtres, les Lévites et les chefs des tribus et les amenèrent à Jérusalem chez le grand-prêtre.
Celui-ci exigea d’eux le serment de bien garder le secret qu’ils apprendraient de lui et qui réclamait à la fois le silence et une action commune. Le serment prêté, il put parler en sécurité ; alors, ayant fait approcher le descendant de la race de David : « Voici votre roi, dit-il, issu de cette maison à qui, vous le savez, Dieu a prophétisé qu’elle règnerait sur vous à perpétuité. Je recommande que la troisième section d’entre vous veille sur lui dans le sanctuaire, que la quatrième garde toutes les portes du Temple, que la suivante surveille la porte qui s’ouvre et donne dans le palais royal, que le reste de la multitude se tienne sans armes dans le sanctuaire ; n’y laissez pénétrer aucun homme en armes, si ce n’est un prêtre. »
Il ordonna, en outre, qu’une partie des prêtres et les Lévites se tinssent autour du roi lui-même comme gardes du corps, l’épée nue, pour faire périr quiconque oserait entrer en armes dans le sanctuaire, et que, sans rien craindre, ils demeurassent pour protéger le roi. Eux, dociles au conseil que leur donnait le grand-prêtre, manifestèrent leurs sentiments par leurs actes. Joad, ayant ouvert le dépôt d’armes que David avait établi dans le sanctuaire, distribua aux centurions, ainsi qu’aux prêtres et aux lévites, tout ce qu’il y trouva de lances, de carquois et de toutes autres sortes d’armes ; une fois armés, il les posta en cercle autour du Temple, se tenant par la main les uns les autres, de manière à en défendre l’accès à ceux qui ne devaient pas entrer. Puis, avant fait avancer l’enfant, ils posèrent sur lui la couronne royale, et Joad, l’ayant oint de l’huile sacrée, le proclama roi. Et tout le peuple, plein de joie, frappa des mains en criant : « Vive le roi ! »
Athalie, avant entendu ce tumulte et ces acclamations inattendus ; l’esprit tout bouleversé, bondit hors du palais royal avec sa propre garde. Parvenue au sanctuaire, elle y est admise par les patres ; quant aux hommes d’armes qui la suivaient, l’entrée leur fut interdite par les gens rangés en cercle qui en avaient reçu l’ordre du grand-prêtre. Quand Athalie aperçut l’enfant debout sur l’estrade, la tête ceinte du bandeau royal, elle déchira ses vêtements et poussa de grands cris, ordonnant de tuer celui qui avait préparé ce guet-apens et cherché à lui arracher le pouvoir. Mais Joad, ayant appelé les centurions, leur donna l’ordre de traîner Athalie dans la vallée du Cédronet de l’y mettre à mort : car il ne voulait pas souiller le sanctuaire en y châtiant la criminelle. Il commanda, en outre, si quelqu’un s’avançait pour lui porter secours, qu’on l’immolât également. Les hommes chargés d’exécuter Athalie mirent les mains sur elle, la conduisirent à la porte des mules du roi et l’y tirent périr.
Après qu’on se fut défait d’Athalie par ce stratagème, Joad convoqua dans le sanctuaire le peuple et les hommes d’armes, et leur fit jurer d’être fidèles au roi et de veiller sur sa sécurité et l’accroissement de sou empire. (…)
« Telle est la relation de ce qui concerne le roi Joas, comment il échappa aux embûches d’Athalie et reçut la royauté« .
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[i] Flavius Josephe Les Antiquités Judaïques Livre IX – VII. Site L’antiquité grecque et latine du Moyen Age, de Philippe Remacle.
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