La légende de François de Paule marchand sur les flots, naît du refus d’un patron de barque de conduire François de Paul à Messine. Ce miracle va lui donner le statut de saint patron des marins.
Ce miracle renvoie au passage du nouveau testament (Matthieu 14, 22-33) où Jésus marche sur les flots. Le croyant, s’il garde les yeux sur Jésus, peut accomplir lui aussi ce miracle. S’il s’en détourne, il sombre. Ainsi, Pierre parvient à rejoindre Jésus, en marchant sur les flots. C’est le sens du tableau de Saint François de Paule, assimilé à cet épisode du croyant rejoignant le Christ.
Franz Liszt a deux saints patrons: François d’Assise et François de Paule. Le compositeur va donner vie à deux légendes contrastées et complémentaires: la prédication aux oiseaux de Saint François d’Assise et la légende de Saint François de Paule marchant sur les flots.
« Comme souvent dans sa démarche créatrice, un élément extra-musical suscite une œuvre musicale, et les deux saints François donnent lieu à ce diptyque pianistique, le Saint d’Assise créant une pièce lumineuse et aérienne, tandis que le Saint de Paule donne une page pianistique au rythme lourd et à l’ambiance tumultueuse« [i].

Saint François de Paule traversant le détroit de Messine sur son manteau par Benedetto Luti Museo Regionale da Messina
Laissons l’auteur raconter la composition musicale de Liszt:
« Liszt donne à entendre dès le début, sans prélude initial, le thème de choral qui conduira toute la pièce : en deux périodes séparées par un silence, il est énoncé dans l’extrême-grave du clavier, à l’unisson, dans une tonalité indécise et la nuance pianissimo, ce qui crée une impression de lointain. Son profil est semblable à celui de la Marche des pèlerins dans Tannhaüser de Richard Wagner, avec sa quarte ascendante en incipit, franche et massive, et ses valeurs rythmiques lentes qui dessinent les pas assurés du personnage. Ce thème caractérise la personnalité de Saint-François, habité d’une foi inébranlable et d’une assurance à toute épreuve face à l’agitation de la mer.
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Anne Marie Dubois au piano – Franz Liszt Legende n°2 S 175 Video You Tube
« Le leitmotiv entame sa route, dans le registre medium, sur des eaux plutôt calmes, puis accompagné par des trémolos et des gammes qui figurent les flots bouillonnants, le thème poursuit sa traversée, malgré une tempête qui grandit, qui gronde dans des arpèges déchaînés, dans des chromatismes houleux, des traits pianistiques en mouvement contraire, des gammes et des octaves qui déferlent sur tout le clavier. A certains moments, on a l’impression que le personnage est noyé par les houles de la tempête, car on n’entend plus le thème, interrompu par des vagues qui le submergent, en arpèges rapides ascendants et descendants. Il réapparait dans le grave, sous des flots d’arpèges rapides, puis après quelques remous, connaît une apothéose dans l’aigu, sur des accords brisés qui ramènent un peu de calme.
Juste avant la fin, dans un tempo piu lento, le leitmotiv est entrecoupé de silences, et ponctué par de brefs accords arpégés, il se métamorphose en Eusebius, rêveur et mélancolique. Dans cette ambiance schumannienne, il réapparaît à la basse apaisé, quasi à nu, avant d’éclater dans une péroraison lumineuse et triomphale, dans un Mi Majeur victorieux, plein d’allégresse. »
Un article remarquable dont je recommande la lecture à tous (lien ci-dessous en note 1).
Pour en savoir plus sur Saint-François de Paule voir l’article sur ce Blog.

Portrait de Franz Liszt (1811-1886) compositeur et pianiste hongrois
Lehmann Henri (1814-1882) Inventaire n°P.1683 Paris, musée Carnavalet
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[i] Cet article relaie l’article « Présence de l’eau dans le mysticisme de Franz Liszt – 2 : Saint-François de Paule marchant sur les flots » du site Narthex, un article remarquable de Pascale Guitton-Lanquest.
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